Il suffit d’une voix, un léger accompagnement sous le signe des mélodies minimalistes, les locaux calmes du Soir, un Sharko envoûtant et là, en un clin d’œil, on y est, au cœur d’une chanson, avec un zeste de poésie qui flotte au-dessus des quatre cordes du ukulélé.
Ce n’était pourtant pas gagné, au départ. L’essence d’une chanson, d’un air, voire même d’un tube, c’est quoi ? Une mélodie chantée, sans orchestration multiple, avec un instrument minimaliste incarné par un ukulélé, importé des îles hawaiiennes. Sharko a défini le concept mais reste perplexe. Perplexe il est, mais la curiosité artistique prend le dessus et il accepte de tourner ce qui, à l’origine, devait être le numéro 0 des ukulélés sessions du Soir. Curieux il reste lorsqu’il demande à venir voir les locaux du Soir.
Et là, absente, la tension fébrile qu’on pourrait s’attendre à voir lorsqu’on a l’imaginaire imprégné des films des années 30. Les journalistes sont là mais personne ne court ni se bouscule ni s’interpelle (et encore moins s’insulte, quelle impassibilité, mazette). Il faut dire qu’en ce lendemain d’élections (nous étions le lundi 11 juin), c’était plutôt le démon annonciateur des résultats électoraux auquel on s’attendait dans la rédaction. Au lieu de ça, un ange blond est venu envoûter les journalistes qui se sont progressivement décollés de leurs ordinateurs pour goûter la version ukulélé d’« Excellent » (beaucoup plus aérienne, juste, et moins assoupissante que celle que le gagnant de la Nouvelle Star, Julien Doré, a produite sur le plateau de France 2…).
Sharko, beau Prince, réinvente « Kiss », sans beat, guitare blanche ni voix suraiguë. Évidemment, c’est tellement plus excitant d’aller revisiter un classique plutôt que de faire la promotion du nouvel album (« Molécule », paru chez Bang, sur lequel justement les titres « No Contest » et « I Need Someone » sont joués au ukulélé). Fallait s’y attendre. L’artiste regrette de ne pas avoir mis le feu à la rédaction. Pas de regret, nous avons eu des étincelles plein les yeux.
Lætitia Vignaud (St.)