Okkervil River, le jour et la nuit

 Pendant que le groupe répétait en mode mineur les morceaux qu’il allait interpréter devant notre caméra, on en était déjà à se triturer les méninges à la recherche du titre qui amorcerait le papier accompagnant la session. Et le terme “porte-bonheur” était de ceux qui nous paraissait s’imposer le plus naturellement. Mais, limites de l’arithmétique, la 13e de nos sessions acoustiques est déjà passée, depuis belle lurette (c’était Vinicius Cantuaria ).

Et le groupe originaire d’Austin n’en étant guère non plus à son treizième disque, il eut fallu trouver un autre argument, le nombre de lettres du nom du groupe étant a priori un peu mince pour justifier qu’on les considère comme l’équivalent d’un trèfle à quatre feuilles.

Le plus évident est peut-être tout simplement de se pencher sur le dernier album en date du groupe, paru en octobre dernier, le brillant “The Stage Names”, qui succède au sous-estimé “Black Sheep Boy”. Tandis qu’Arcade Fire captait toute l’attention, fin 2005, les fulgurances de cet album demeuraient à l’ombre, un endroit finalement pas si mal choisi pour y révéler toute leur luminosité folk.

Avec “The Stage Names”, l’art de ce diablotin de Will Sheff, grand gars à l’allure d’étudiant en philosophie, continue à s’éléver en atteignant par moments des sommets mélodiques à l’image de la première pièce “Our Life is Not A Movie or Maybe” et son chant frénétique, tandis qu’on trouvera en “A Girl In a Port” toutes les raisons de se dire que la pop anglaise emprunte trop souvent la voie de la facilité. Parce que si Okkervil River emprunte le livre de recettes de la chanson mélancolique (à la Travis, pas si loin d’un Coldplay), la manière est celle des grands chefs qui vous transforme une crème brûlée en régal gastronomique.

Pour Will Sheff, chanteur et âme du groupe, l’évolution vers “The Stage Names” se marque par une recherche d’équilibre, et de structuration des morceaux, plus lisibles que dans le passé, sans qu’on puisse y voir une concession à la facilité. “Aller vers le jour après la nuit” résume ainsi la quête du groupe, à géomètrie variable autour de son chanteur.

Il faut rendre à César ce qui lui appartient: c’est à Redboy de My Little Cheap Dictaphone qu’on doit l’idée de proposer le challenge acoustique à Okkervil River. Lequel était prêt à apprendre vite fait deux morceaux pour pouvoir se glisser aux côtés du grand Will. Grande idée si on en juge par le résultat: entre deux rangées de casier dans les vestiaires de l’Ancienne Belgique, Okkervil River a su comme aucun traduire sa virtuosité musicale. On conseille évidemmment l’original de “A King And A Queen” (sur “Black Sheep Boy”) à tous ceux qui fondent devant le génie de Beirut, ou ceux qui comme nous auront adoré le “Ash Wednesday” d’Elvis Perkins. Et pour en revenir à “The Stage Names”, cette session acoustique s’ouvre sur “A Hand To Take Hold Of The Scene”. Une chanson qui tournoie comme un manège à la foire du Midi. Autour de l’idée de rêve et d’imaginaire, dixit son chanteur. Et il est évident qu’Okkervil River, sur ce coup-là, nous laisse ko debout.


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8 Comments

  1. Stef

    26 novembre 2007 à 21 h 22 min

    Merci Le Soir, très jolie session. Groupe intéressant, vais m’empresser d’aller écouter leur disque.
    SYmpa, l’idée des casiers. C’est qui les suivants?

  2. Debehogne

    27 novembre 2007 à 9 h 59 min

    Magnifique session. C’est une super idée d’avoir imité les concerts à emporter de la Blogothèque !!!

  3. Le Soir

    27 novembre 2007 à 13 h 29 min

    “Imité” ? A quel titre? parce qu’on a sollicité Okkervil River ou parce qu’on fait des sessions acoustiques?
    Dans tous les cas, il est certain qu’il vaut mieux s’inspirer des Concerts à Emporter que d’autres, et la Blogothèque reste une source d’inspiration majeure.

  4. Debehogne

    27 novembre 2007 à 13 h 35 min

    Ne le prenez pas mal. C’est un compliment, et c’est en quelque sorte une imitation du principe de la blogo que de prendre un artiste et de le mettre dans une situation insolite pour faire ses chansons, enfin je trouves. Avec ici l’ajout du ukulélé comme fil rouge.
    Mais continuer c’est super …

  5. Le Soir

    27 novembre 2007 à 13 h 45 min

    ah mais on ne le prend pas mal. Au contraire. je tenais juste à savoir à quel titre tu pensais qu’on les imitait.
    Le plaisir étant que, pour Okkervil River, il ne nous semble pas avoir été “moins bon” qu’eux 😉

  6. Debehogne

    27 novembre 2007 à 14 h 23 min

    Non en effet pas de quoi rougir sur ce coup là.
    J’ai bien aimé Malajube aussi. Je me disais en regrdant “mais pourquoi j’etais pas dans la rue à ce moment là!!”.

  7. rococo

    6 décembre 2007 à 20 h 06 min

    Trop fort, Okkervil River, j’adore. Vais d’ailleurs me plonger dans les autres sessions. J’connaissais pas encore, mais merci

  8. redboy

    20 décembre 2007 à 13 h 37 min

    aaargh… J’aurais aimé avoir pu être la..

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