Berry

Ce nouveau visage de la chanson française sera mercredi aux Nuits Botanique.

Son disque s’ouvre par les cordes arrangées et dirigées par Eumir Deodato. Puis arrive « Mademoiselle », une voix douce, un style dépouillé, délicat, qui nous rappelle Anna Karina ou Jane Birkin. Voire Françoise Hardy.

Ainsi commence le premier album de Berry, un joli sourire et des yeux noisette pétillants… qui nous font un peu penser à Jil Caplan, vingt ans plus tôt.

Berry chante ensuite « Le bonheur » sur un rythme gainsbourien en diable. Après s’être présentée (Mademoiselle j’ai des secrets/ Des choses que je sais, que je tais/ Un vieux Bubble Gum/ Qui colle à la peau comme un homme), Berry nous chante le bonheur (N’ayez pas peur du bonheur/ Il n’existe pas/ Ni ici, ni ailleurs… Nous allons mourir demain).

Un harmonica, un piano, une guitare acoustique… Tout est en finesse et en fragilité. Avec un côté western, comme Jay Alanski avec Caplan, à l’époque de A peine 21.

Discrète, Berry tient à l’être. Au point de se cacher derrière un pseudonyme et deux partenaires plus âgés qu’elle. A commencer par Manou qu’elle découvre, il y a une dizaine d’années, dans un club de jazz de Poitiers. « C’est moi qui l’ai présenté à Lionel Dudognon qui est aussi devenu un ami. »

Manou jouait dans un sextet de jazz. Lionel est guitariste. L’un comme l’autre ne quittent plus Berry qui, à ce moment-là, passe tout son temps libre sur les planches de théâtre, à Poitiers, puis à Paris.

« “Et si on faisait des chansons ensemble ?” C’est ce qu’on s’est dit tous les trois et c’est comme ça que ça a commencé. » Berry écrit les textes et Manou les musiques. Lionel programme et réalise.

« Toute seule, je ne ferais pas grand-chose. Car j’ai toujours écrit des textes, avant même de découvrir, sur le tard, le plaisir de chanter. Dans ma petite enfance, j’ai beaucoup lu de poésie. Tout en aimant faire sonner les mots. C’est quelque chose de très intime. »

On comprend mieux maintenant pourquoi, sur son premier album, intitulé Mademoiselle, on retrouve deux textes mis en musique, de Verlaine, « Chéri » et « Les heures bleues ». « Ce que j’adore chez Verlaine, c’est sa façon de raconter le désir. J’ai toujours aimé défendre sur scène les textes de Molière, Sénèque ou Wedekind mais, même si le théâtre m’aide, les concerts sont beaucoup plus intimidants car je dois y défendre mes textes qui font partie de mon intimité. »

On remarquera que de nombreux textes de Berry se rejoignent sur l’inquiétude de la vie et de la mort. Avec une gravité et une sensibilité très matures : « J’ai perdu des gens que j’aimais beaucoup. Il m’est arrivé récemment d’accompagner un mourant. Tout cela se retrouve dans mes textes sans aucun doute. »

Berry avoue qu’elle n’a jamais eu de rêve ni d’ambition dans la chanson. Et encore moins de célébrité. Tout est arrivé lentement, tranquillement, naturellement. Le frère de Manou travaille dans l’industrie du disque et tout de suite, Mercury manifeste son intérêt, tout en laissant le trio fignoler à son aise ce qui est devenu « Mademoiselle ».

« Lionel a fait longtemps du jazz et a gardé ce côté artisanal. Avant d’entrer en studio, à l’ICP de Bruxelles, on avait bricolé entre nous un tas de choses qu’on a gardées. Tout le disque a été une chouette aventure humaine. Tout s’est passé, en fait, avant de signer avec Mercury. En toute liberté et décontraction. Notre luxe a été de prendre notre temps, sans aucune pression. Ce disque est fait d’accidents qui sont devenus de belles chansons. »

Et les concerts, Berry les prend comme de beaux cadeaux à partager avec le public : « Je suis ravie, malgré la peur. J’adore tout ça même si je n’arrive pas à faire des projets de vie. » Berry vit dorénavant à Paris mais retourne régulièrement à Poitiers où vit toujours Lionel Dudognon, sa famille et ses amis. Jolie comme un cœur, Berry est craquante à souhait. Sa simplicité et sa timidité ne font que renforcer une envie de chérir celle qui a tout du petit oiseau tombé trop tôt du nid.

« Ma biographie reste volontairement très discrète. Je n’ai pas envie de tout partager avec les gens. Quand tu donnes une image de toi au public, t’as le choix. Moi, mon truc, ce n’est pas les fêtes mondaines où je n’irai jamais. Je ne me sens pas très people, comme fille. C’est pour ça que je me cache un peu derrière Manou et Lionel. Je donne ma vision de la vie, de l’amitié et de l’amour. Ce qui m’appartient. Le plus honnêtement possible. »

Berry sera ce mercredi 7 aux Nuits Botanique, à la Rotonde, entre Suarez et Albin de la Simone. Album Mademoiselle (Mercury-Universal).

THIERRY COLJON

Une des toutes premières apparitions de Berry en télévision, aux Fêtes de la Musique en janvier dernier.

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