Nuits Bota : Tunng brouille les pistes

tunng.jpgLa critique musicale, sur le modèle des sciences dures, a toujours aimé classifier la musique en étiquetant consciencieusement les différentes formes qu’elle emprunte au fil du temps. Par facilité sans doute. Compartimenter, c’est sûr, permet d’avoir des repères quand il s’agit d’écouter pour la première fois un nouveau groupe, un nouveau disque, puis d’avoir quelque chose à en dire (puisque c’est bien de cela qu’il s’agit).

Ces dernières années, ceci dit, le critique méthodique – celui qui distribue les genres et leurs sous-sections comme des attributs pour des fromages : doux, dur, jeune, vieux, crémeux – est plus que jamais mis à mal par un foisonnement de groupes dont la musique déborde sur la marge, explose les frontières et s’en va forniquer en orgies folles dans des tiroirs à priori indétroussables jusque là.

Ainsi en va-t-il notamment de Tunng, formation londonienne qu’on a pu voir dans l’Orangerie en ce mercredi de Nuits Botanique et qu’au petit jeu des étiquettes on devrait bien se résoudre à labelliser par quelque chose comme « psyché-folktronica ». Ahem. Vous imaginez du coup le genre de dialogue susceptible d’être entendu dans les couloirs du Botanique :

* Tu vas voir quoi ce soir ?
* Tunng.
* Connais pas. C’est quel genre ?
* Genre psyché-folktronica je dirais.
* …ah… ouais… cooool… bon tu m’excuses, y a des potes pas prise de tête pour un sou qui m’attendent au bar avec des bières.

Folk, psychédélisme et electronica discrète sont donc autant d’ingrédients qui composent la musique de Tunng. On en restera là pour le jeu fastidieux des étiquettes, auquel on préférera celui, plus parlant, des parentés. A l’écoute de Tunng, on pense souvent à un Yeasayer sous sédatif, un Animal Collective période folk sous forte perfusion de Tranxène. Ce qui veut dire qu’expérimentation et douce folie ne sont jamais très loin. Ce qui implique aussi et peut-être surtout que l’on se situe constamment sur le fil, ténu, entre grâce fragile et goût pour le moins douteux.

Dans l’Orangerie ce mercredi, Tunng, fidèle finalement en cela à l’image qu’il véhicule, a livré une prestation en montagnes russes. Le concert connaissant des envolées aussi étranges que communicatives (« Soup », morceau qui ressemble sur le coup furieusement au résultat d’une improbable jam entre DJ Shadow et les barbus chevelus de Slayer qui n’auraient sous la main que des guitares électro-acoustiques), affichant au compteur quelques pures merveilles (« Take », « Bullets »), mais flirtant plus qu’à son tour avec l’ennui et la morosité. Il faut dire que, sur scène comme sur disque, la musique de Tunng – ses guitares boisées, ses voix caressantes à l’unisson – a quelque chose de profondément indolent. (N.Cl.)

http://www.myspace.com/thisistunng

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1 commentaire

  1. Lio

    8 mai 2008 à 15 h 55 min

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