File d’attente, longue et embêtante. Logique pour un concert. File d’attente sur le perron d’une cathédrale, un soir de pleine lune, moins logique mais tout aussi embêtant.
En clôture des Nuits du Bota, Jean-Paul Dessy et l’Ensemble Musiques Nouvelles avaient donné rendez-vous aux festivaliers en un lieu magique pour les uns, mystique pour les autres, tout simplement sonique devant l’Eternel.
A deux pas mais, néanmoins et symboliquement, loin du Botanique, de ses serres chaudes, ses jardins d’Eden et son bar d’en bas, la cathédrale des saints Michel et Gudule s’est donc transformée, dimanche soir, en salle de concert. Un concert “à la croisée des chemins spirituels et sonores, rencontre, par delà les époques et les styles, de musiciens acceptant de quitter leur rivage habituel – classique pour les uns, electro pour les autres – pour édifier au coeur de la cathédrale des instants de grâce par l’écoute dans la contemplation ou la jubilation” vante le programme de la soirée.
Avec, donc, Jean-Paul Dessy à la direction musicale de l’Ensemble Musiques Nouvelles, orchestre à cordes et percussions de circonstance, mais aussi et encore Thomas Lacôte en grand organiste-funambule d’un soir de sainte Gudule, Ibrahim Maalouf en trompétiste atmosphérique et Murcof derrière un “laptop electronica” en droite ligne du Mexique.
Au programme: des oeuvres de Jean-Sébastien Bach (la Chaconne, prélude et fugue pour orgue), de Jean-Paul Dessy (Inner Future en création belge), de Murcof (Ruido, Cosmos, Oort), d’Ibrahim Maalouf (Création) et d’Arvo Pärt (Fratres).
Une cloche. Puis un bourdonnement étrange. D’abord un mystère. ” La musicienne aux cheveux bouclés, on dirait un robot. L’orchestre, des automates”. Crescendo. Le voyage commence. Loin du temps. En dehors de l’espace. Note après note, la cathédrale s’ouvre pour recevoir les sons, les garder jalousement un instant puis les renvoyer au public silencieux, recueilli, en communion. Comme pour un moment de prière.
Tout s’enchaîne. Harmonieusement. Religieusement. Murcof, vaisseau amiral, joue les transitions électroniques entre Dessy contempltaif, méditatif, Bach réjouissant mais parfois aussi léger qu’un Vivaldi et Arvo Pärt, terrible, qui s’avance comme un géant, à pas lents, dans une cathédrale devenue rouge. Les ombres de l’orchestre de Musiques Nouvelles s’amusent avec les piliers du temple tantôt bleus, tantôt blancs. La musique entraîne loin, très loin. Aussi loin que peut transporter la trompette d’Ibrahim Maalouf. Aussi loin que peut entraîner l’orgue suspendu de Gudule. Le diable a beau souffler ce soir-là sur sa lanterne, il ne parviendra pas à l’éteindre. Jamais.
Une cloche. Sonic Cathedral prend fin comme il avait commencé. Le concert en tout cas, parce que les notes, elles, continuent de trotter dans la tête. Longtemps. Toujours.
Les Nuits du Botanique, édition 2008, c’est fini. Un soir de pleine lune. De bon augure pour l’édition 2009.
Alain Gérard
Nikkel
19 mai 2008 à 18 h 46 min
Un moment hors du temps,
c’était magique, tout simplement!