Les petits magasins indépendants disparaissent. Les labels se regroupent, liquident du personnel et écoulent de moins en moins d’albums. Survolant le chaos, l’ogre internet est souvent assimilé à l’ennemi public numéro 1. Enfin, pas par tout le monde. Pas par l’un des ancêtres de la musique, un gringalet solitaire qui s’est rarement aussi bien porté : le single. MGMT l’a pigé dès le début. Oracular spectacular, le premier disque de ce jeune duo new-yorkais devenu groupe pour les nécessités des tournées, est une collection de tubes. Immédiats. Accrocheurs.
ManaGeMenT, c’est le viagra du psychédélisme. Une pop recyclée et inventive piquée aux anabolisants. Il y a du Bowie, du Queen, du T-Rex et même une pincée de Phoenix. Si Andrew VanWyngarden et Ben Goldwasser prétendent ne posséder aucune cassette, aucun vinyle, aucun CD. C’est qu’ils ont puisé leur connaissance encyclopédique de la musique sur le web.
« Ces derniers temps, j’ai écouté beaucoup de trucs obscurs de la fin des années 70, explique Goldwasser. Cabaret Voltaire, Suicide… J’aime beaucoup le psychédélisme à la Spiritualized, mais je suis parfois embêté par ce petit côté “Tu n’as jamais rien entendu de tel”. Les groupes industriels allient un son horrible à une véritable musicalité qui m’intrigue. »
Pas étonnant venant d’un groupe qui lors de son premier concert, dans sa fac au Connecticut, joue pendant pratiquement une heure une seule et même chanson : le générique de Ghostbusters.
« Je ne pense pas qu’il faille nécessairement consommer de la drogue pour créer de la musique psychédélique. J’ai écouté des disques composés par des mecs très sains et qui sonnaient comme des trips hallucinants. Les drogues servent peut-être de porte vers un autre niveau de conscience, mais on peut y accéder sans elles. J’essaie par exemple de retrouver mon âme d’enfant. »
MGMT en fait parfois un peu trop. Grandiloquent. Certains diront pompeux. Il assume toutefois ses faiblesses, qui font finalement sa force. « Nous sommes en quelque sorte fascinés par le mauvais goût, reconnaît Ben. Nous écoutons plein de trucs qu’on aime détester. “4th Dimensional Transition” est sans doute notre morceau le plus douteux, et en même temps, c’est l’un de mes préférés. Un plaisir coupable… Notre label a du mal à le comprendre. Et je n’arrive pas à l’expliquer. J’ai très tôt aimé les trucs kitsch, discutables, voire dégueulasses. »
Au front…
L’histoire du duo est à la fois simple et improbable. « Nous n’avons jamais planifié d’enregistrer un disque, de le vendre et de partir en tournée. Nous pensions terminer nos études et essayer de trouver un job. Comme tout le monde. » Avec Andrew, Ben rencontre Of Montreal dans un bar d’Athens, qui les invite sur sa tournée. Des fans vident leurs poches pour créer un label indie et sortir leur premier EP. Un jour, les Brooklyniens d’adoption reçoivent un mail de Sony. « On a eu beaucoup de mal à le prendre au sérieux. Nous n’avions jamais imaginé intéresser qui que ce soit. »
Alors, ils prennent les choses avec légèreté. Columbia leur demande de dresser une liste des producteurs dont ils rêvent. Ils couchent sur papier les noms de Barack Obama et Prince : « Pour déconner. » Et ceux de Nigel Godrich, Tony Visconti et Dave Fridmann : « Des mecs avec qui nous n’osions imaginer travailler. »
Oracular spectacular a pourtant été produit par ce dernier, gourou du psychédélisme moderne, hypnotiseur en chef de Mercury Rev et des Flaming Lips. C’est lui qui a soufflé au duo l’idée d’envoyer peu de chansons à son label pour empêcher celui-ci de ne garder que les titres les plus accessibles.
Le single « Time to pretend » parle de devenir rock star, d’épouser des top models et de mourir étouffé dans son vomi. Ça commence bien. Des GI’s ont demandé aux hippies d’aller jouer au front. « La guerre divise notre pays. Certains ne sont pas derrière les troupes à cause des agressions qu’elles ont pu commettre, mais une partie des soldats croit en la paix. Puis, des jeunes s’engagent dans l’armée parce qu’ils sont sans le sou. Tout n’est pas blanc ou noir. » MGMT voit la vie en couleurs.
Rock Werchter. Samedi (13h45 – 14h35), Marquee.
Oracular spectacular (Sony – BMG).
JULIEN BROQUET
sylvain fesson
25 août 2008 à 1 h 21 min
Salut,
Bel article. J’en au écrit un assez transversal sur MGMT + long entretien avec le chanteur.
C’est ici si ça vous intéresse
http://parlhot.over-blog.com
Amicalement
Sylvain