Si le concert de Cypress Hill du jeudi restera comme le moment phare des Ardentes au niveau ambiance, c’est bien Alain Bashung qui, ce dimanche, a provoqué la plus puissante tempête d’émotions sur Liège.
C’est un fameux carré d’as qui avait pour tâche de clôturer quatre jours de réjouissances musicales en bord de Meuse ce dimanche. Un grand soir.
On attaque avec les Girls In Hawaii, qu’on a déjà connus plus timorés. Il faut dire qu’ici à Liège ils jouent un peu comme à la maison (on connaît notamment les liens qui les unissent à l’excellent collectif JauneOrange). Si leur set reste relativement prévisible et sans surprise, surtout pour qui les a déjà vus plus tôt dans l’année, on apprécie la manière. Ainsi que la façon dont se marient anciens et nouveaux titres, moments calmes et passages plus rock et nerveux (mention toute spéciale pour Bored et le final de Birthday Call). Convaincant, à défaut d’être renversant.
Une mécanique qui a du cœur
Rock et nerveux, le concert de Dionysos le sera assurément. Et puis hautement festif. On a beau s’y attendre, on est à chaque fois sidéré par l’énergie hallucinante dégagée par les Français. Entouré d’horloges folles ou en forme de cœur, le groupe se dépense sans compter et navigue à vue (de Coccinelle au Jour le plus froid du monde en passant par Song for Jedi ou L’homme qui pondait des œufs) dans l’ensemble de son répertoire. Mathias Malzieu, survolté et toujours du bon côté de la ligne qui sépare le personnage haut en couleurs de la caricature, n’a comme à son habitude pas mis longtemps à exciter la foule, bondissant de manière à peine humaine, escaladant, crowd surfant à tout va et organisant même un grand prix de Belgique de « Ta gueule le chat ! » sur La Métamorphose de Mister Chat (Ardentes 1 – Cirque Royal 0, selon le sonomètre logé dans l’oreille interne du chanteur). Roboratif.
On s’éclipse un tout petit peu avant la fin du concert de Dionysos afin de se positionner aux avant-postes pour celui d’Alain Bashung dans les halles. Sa tournée des Grands Espaces nous avait laissé un souvenir tellement fantastique qu’il n’était pas question d’en rater une seule miette. Lunettes fumées, chapeau, cravate et costard noirs, Bashung s’avance. Comme un lego, c’est le titre bouleversant qui élève d’entrée les débats à des hauteurs himalayennes dont on n’est pas prêts de redescendre. Je t’ai manqué et Hier à Sousse viennent dans la foulée s’emboîter sur ce lego pour former un premier bloc extrait du récent Bleu Pétrole. Avant que Bashung ne jette un œil dans le rétro le temps de Volontaire, Mes Prisons et un Samuel Hall pour moitié gâché par un guitariste chevelu très hard rock dans l’âme, et donc démonstratif au possible, qui saccagera quelques-uns des morceaux les plus électriques. Retour au nouvel album avec une somptueuse Vénus et Je tuerai la pianiste, entre lesquels vient se loger La nuit je mens que le public, sans doute en manque de classiques populaires, accueille avec enthousiasme. S’il n’a plus rien d’un Novice, Bashung demande qu’on le secoue le temps d’une Légère Eclaircie puis ralentit sans doute un peu trop le tempo avec A Perte de vue et Happe (beaucoup plus lents que sur disque) avant de ranimer la foule avec la décharge Osez Joséphine, introduite par un bout du Blowin’ In The Wind de Dylan. La classe.
Le rappel sera royal avec Madame rêve (sans aucun doute l’une des plus belles chansons dans la langue de Voltaire entendues ces vingt dernières années), Vertige de l’amour et Malaxe. Ne pas chercher plus loin : Bashung est le plus grand bonhomme de la chanson française d’aujourd’hui, lui qui surclasse la concurrence avec une grâce et une profondeur de toutes façons inégalables.
Il reviendra une dernière fois chanter, seul à la guitare, Angora… beau à pleurer. Avant de dire bonne nuit au public liégeois et lui souhaiter, comme dans Osez Joséphine, « que ne durent que les moments doux ».
Tellement émouvant qu’à vrai dire il fut difficile de se plonger dans le concert des pourtant excellents Dandy Warhols qui ont livré un concert étrange pour ne pas dire suicidaire en clôture sur la grande scène. Ce qui n’est pas pour nous déplaire. Après avoir joué quelques vieux tubes de manière mollassonne, la bande, visiblement bien défoncée, de Courtney Taylor-Taylor (à qui notre photographe avait mis une raclée au ping-pong un peu plus tôt dans la journée à l’espace presse) s’est lancée dans une longue montée psyché ultra planante au fil de morceaux nettement moins évidents (dont certains, peu intéressants à priori, de leur tout nouvel album) mais terriblement tripants pour le coup. Une vraie expérience sensorielle qui met un point final (en zigzag le point) à un festival riche et dense jusque dans ses derniers instants. Chapeau bas.
NICOLAS CLEMENT
Setlist
Comme un lego
Je t’ai manqué
Hier à Sousse
Volontaire
Mes prisons
Samuel Hall
Vénus
La nuit je mens
Je tuerai la pianiste
Légère éclaircie
A perte de vue
Happe
Osez Joséphine
Fantaisie militaire
Madame rêve
Vertige de l’amour
Malaxe
Angora
Nights in white satin
kevo
14 juillet 2008 à 12 h 09 min
“gâché par un guitariste chevelu très hard rock dans l’âme, et donc démonstratif au possible, qui saccagera quelques-uns des morceaux les plus électriques. ”
Faut aller voir Celine Dion si vous n’aimez pas les guitares. Non mais..
N.Cl
14 juillet 2008 à 13 h 19 min
@ kevo
On s’est mal compris. L’idée c’est de regretter que ce guitariste, très pro il n’y a pas à dire, joue par moments avec Bashung comme s’il était dans Guns N’Roses il y a quinze ans. Ce n’est pas tout à fait la même chose et il y a donc un léger décalage quand même… Mais peu importe, ça reste un détail dans l’ensemble.
xav
14 juillet 2008 à 13 h 23 min
Bashung est effectivement le plus grand…
Rien à redire là-dessus.
A des années lumières de toute la clique ‘nouvelle chanson française’ en tous cas.
Car lui explore au lieu de recycler.
Tom
14 juillet 2008 à 14 h 13 min
Simplement magistral. Le guitariste, j’l’avais déjà vu avec Hubert-Félix Thiéfaine … Même si c’est déjà plus le style hard-rock, il avait là aussi gâché une partie du spectacle à râler sur sa guitare.
Enfin … Bashung a une fois de plus démontré qu’il était grand. Très grand.
omerb
14 juillet 2008 à 14 h 29 min
ai vu bashung au cirque royal, il est très grand certes
mais qui de vous l’aurait dit quand il chantait “gaby”
alors bon, être très grand, ça veut dire vieux, avec tout un passé, toute une maîtrise etc…
je trouve que c’est très cul cul (turel) de le comparer et de dire qu’il est “le plus grand”…
enfin si vous voyez ce que je veux dire…
quant au guitariste, s’il joue comme ça, c’est que bashung l’a bien voulu non ?
Lotchi
14 juillet 2008 à 15 h 39 min
Y avait des musiciens avec Bashung.
Moi je n’ai vu que l’homme de toute grand classe sur la scène.
Merci Alain!
thib
14 juillet 2008 à 16 h 01 min
Pouvez-vous me dire quelle toute dernière chanson (en anglais) Bashung a-t-il jouée après Angora ?
Merci .
phil
14 juillet 2008 à 16 h 07 min
night in white satin des Moody Blues
kevo
14 juillet 2008 à 16 h 24 min
perso j’apprécie beaucoup ce coté rock qu’apporte le guitariste en live mais merci pour tes précisions 😉 Et vivement un prochain concert !
lulubelle
14 juillet 2008 à 16 h 46 min
et Yoav????
C’était vraiment un set envoutant, j’ai trouvé ca fort!
Timon
14 juillet 2008 à 17 h 06 min
Grandiose! Un tout grand bonhomme en effet!
Compuphonic
14 juillet 2008 à 19 h 08 min
C’était un concert somptueux, d’une profondeur immense. Artistiquement complètement abouti…
il m’a touché jusqu’au plus profond de mon âme.
sicatrick
14 juillet 2008 à 22 h 23 min
D’abord, si ils me lisent, un grand merci aux deux auto-stoppeurs liégeois, un tantinet bizarroïdes, que j’ai pris dans ma voiture, qui m’ont remis moi et ma fille, deux tournaisiens totalement perdus dans Liège et sa région, dans la bonne direction des Ardentes. L’habit ne fait pas le moine.
Nos préférés Arno, Dyonisos, Bashung… et tous les autres que nous avons aimé ou pas mais dont nous respectons le travail artistique nous ont donné envie de revenir l’an prochain à Liège pour les Ardentes. Mais avec un gps. Si vous faites du stop pas de prob il y aura toujours 3 places de libre dans la bagnole.
Monsieur Poireau
15 juillet 2008 à 13 h 49 min
Le guitariste joue comme le veut Bashung, on peut quand même supposer que ce n’est pas leur première scène ensemble !
Grande émotion en tout cas de par le public qui ne voulait plus le lacher à la fin. Grande émotion…
:-))
Timon
15 juillet 2008 à 20 h 07 min
Ce n’est pas parce que le guitariste joue comme le veut Bashung qu’il est au dessus de toute critique non plus
jp
16 juillet 2008 à 9 h 08 min
bel article seul bémol yann pechin,le guitariste est formidable et à carte blanche du MAITRE, complètement sous le charme de cette perle de musicien ( déjà présent sur la tournéé des grands espaces, c est pas pour rien…)
Marc(o) de marchin(o)
22 juillet 2008 à 6 h 42 min
Put**n quoi!! comment polémiquer sur une telle chose??? parce que la on ne parle même plus de concert. c’est encore autre chose… c’était magistral parce que ce type commence son adieu au public. le son était foireux, bien d’accord, ce guitariste en a fait un peu trop, mais la voix de Bashung est extraordinaire! Cet enfoiré, peut-être parce que j’étais crevé, ou peut-être parce que j’ai eu l’impression de le voir périr sur scène m’a fait pisser plus d’une larme! Des larmes comme je les aimes. Je ne vais même pas m’étendre sur plus de commentaire… Pour moi extraordinaire ne suffit que parce que je ne trouve mieux. Merci, à cet homme de grande classe en mon sens.
Marc(o) de marchin(o)
22 juillet 2008 à 6 h 47 min
Je m’empresse de rajouter un commentaire (bah oui, finalement) qui concerne le rappel, plus prévue qu’improvisée, ça me parait clair, mais d’une puissance émotionnelle assez grande, et, j’en suis persuadé, pas seulement pour moi. J’ai du mal à m’en remettre… Ce concert fut une grande chose, malgré les nombreuses critiques, des non-fans princpalement.. Je me stop.
javarth
22 juillet 2008 à 11 h 51 min
J’ai suis tombée un peu par hasard sur les différents commentaires relatifs au concert de Bashung. A leur lecture, j’ai à nouveau ressenti ce que j’avais déjà éprouvé lors du concert : une terrible chair de poule ! Les jours se suivent, mais ce concert restera pour moi un grand moment, très émouvant (difficile de ne pas penser à des adieux).
Sandoz
2 août 2008 à 0 h 14 min
Un petit écho de Nyon (Paléo) pour ajouter que, hormis la pluie qui ruisselait à l’extérieur du chapiteau, j’ai aussi pleuré comme un gamin. Comme un gamin que j’étais quand j’ai découvert les premiers titres de ce grand môssieur.
Je lis qu’on crucifie le guitariste et personne ne souligne la beauté des interventions du violoncelliste… Bref un tout grand moment. Qui avait certes quelques relents de cérémonie d’adieux. Mais des adieux de première classe. Je n’oublierai jamais le départ de Bashung qui, le dos tourné, nous lève une dernière fois son chapeau.
Merci
partoche
21 septembre 2008 à 1 h 38 min
(“gâché par un guitariste chevelu très hard rock dans l’âme, et donc démonstratif au possible, qui saccagera quelques-uns des morceaux les plus électriques. ” )
“quant au guitariste, s’il joue comme ça, c’est que bashung l’a bien voulu non ?”
D’accord avec toi omerb! 😉 à la limite cest presque insulter le chanteur que de critiquer son grateux à ce point…sans compter qu’il faisait déjà partie de la tournée des grangs espaces! et yop!
et en passant le guitariste s’appelle Yann Péchin et c’est un vrai virtuose que je me réjouïe de revoir jouer dans cette tournée de bashung!!
lengellé corinne
10 novembre 2008 à 23 h 46 min
yann est un grand guitariste et en plus c’est mon cousin maternel alors respect, merci.
tom
7 septembre 2011 à 19 h 12 min
Je réagis un peu en retard, mais je suis un peu surpris de ce descriptif de Yann Péchin, un guitariste hors de pair, capable de sortir LE son au BON moment avec LA guitare qui va bien. Alain Bashung l’avait choisi pour plusieurs tournées et ce n’est pas pour rien. Bashung aimait cette musique électrique, cette qualité de guitare et a toujours été perfectionniste. Donc si Yann était avec lui, c’est qu’il savait cela et qu’il l’appréciait. Merci à Alain et à Yann pour cette qualité. Quelle Joie j’ai eu de le retrouver à la tournée de Brigitte Fontaine. J’aimerai le retrouver plus souvent sur scène… Au plaisir Yann et merci Alain Bashung pour tout ce que tu as laissé ici.