Le Black Mountains Festival n’a pas trouvé son public lors de sa première édition ce dimanche à Courcelles (Charleroi). Pourtant, le moins que l’on puisse dire c’est que la qualité était au rendez-vous…
Pas évident de s’imposer dans la cour des festivals à l’heure où ceux-ci sont légion. Le Black Mountains Festival en a fait la douloureuse expérience ce dimanche en dépit de solides arguments de programmation.
En dépit aussi d’un cadre et d’une organisation tout à fait irréprochables. Il faisait bon en effet ce dimanche de se trouver dans le Jardin de la Posterie à Courcelles (entre deux averses, il est vrai), devant la scène mais aussi un peu plus loin sur quelque rondin, à savourer une bruschetta passée au grill d’un barbecue chauffé au feu de bois, un potage aux légumes du jardin ou simplement à descendre une pils au prix pour le moins démocratique (1,50 euro la bière, qui dit mieux ?).
Au fond, c’est un peu bête à dire mais il n’aura vraiment manqué que le monde pour faire de cette édition inaugurale une éclatante réussite. Ce qui n’est pas rien évidemment et pose la question des raisons de cet insuccès. Surabondance d’événements du genre ? Mauvaise communication ? Intempéries ? Il semble que l’explication soit plutôt à chercher du côté d’une programmation pointue, exigeante voire défricheuse, qui s’est refusée à céder aux sirènes de noms à coup sûr « bankable » pour privilégier la qualité musicale. Le public n’a pas suivi, on ne peut que le déplorer.
De musique, parlons-en justement. Si l’on excepte les italo-américains de Costa Music, dont la musique rêveuse, très islandaise dans l’âme, pour être très bien faite s’est surtout avérée ennuyeuse à mourir, aucun des groupes, aussi peu familier nous était-il jusque là, n’a déçu. L’événement connaissant son sommet attendu en son final avec les Américains de The War On Drugs qui ont confirmé sur scène tout le bien que l’on pensait d’eux suite aux écoutes répétées de leur premier album Wagonwheel Blues. C’est à un véritable trip sur une Highway 61 au macadam déformé par des hallucinations de nature lysergique que le groupe d’Adam Granduciel le bien nommé nous a conviés une petite heure durant. Classe, savoir-faire et puissance émotionnelle, The War On Drugs a tout des grands. Des très grands même.
Plus tôt dans la soirée, Mariee Sioux, petite sœur de cœur d’Alela Diane au toucher quasi « drakien », nous avait charmés, seule à la guitare, avec une setlist calquée sur celle qu’elle avait proposée à l’AB lors du Domino Festival en avril dernier.
Une Mariee Sioux que l’on a retrouvée au premier rang du concert de Red, sorte d’improbable Tom Waits hexagonal flanqué d’une guitare rectangulaire à la Bo Diddley proposant un blues rock-ailleux tantôt énervé tantôt plus apaisé. Sympa, même si l’on aurait préféré une bonne vieille basse à ce clavier cracra aux sonorités pas toujours très en accord avec la guitare.
Côté belge, on retiendra particulièrement la prestation solide et étonnamment mature de White Circle Crime Club ou encore celle de Madensuyu qui, dans la même configuration guitare-batterie que les White Stripes, peut se vanter de produire un son ravageur. Deux formations flamandes dont on devrait entendre parler à l’avenir.
Les Bruxellois de aMute nous laissent également une impression positive avec un live sans doute un peu trop inégal ceci dit. A l’origine projet du seul Jérôme Deuson, aMute donne l’impression sur certains titres de n’avoir pas encore complètement muté en un groupe à part entière, continuant à convoquer trop souvent et de manière pas toujours justifiée programmation, boucles et bidouillages, ce qui aurait plutôt tendance à désamorcer le côté spontané que pourrait amener cette configuration à plusieurs. Ainsi, les passages portés par des guitares abrasives convainquent nettement plus que ceux faisant la part belle à une folktronica un brin trop intello. Il n’empêche que aMute a du coffre et un univers (comme on dit à la Star Ac’…), un peu comme si quelques résidents canadiens du label post-rock Constellation (Fly Pan Am, A Silver Mt. Zion, …) avaient traversé l’Atlantique pour enregistrer chez les Allemands de Morr Music.
Difficile à l’heure d’aujourd’hui de spéculer sur l’avenir de ce nouveau festival donc. Une chose est sûre : si deuxième édition il y a, nous serons à coup sûr de la partie !
Nicolas CLEMENT