Samedi, au Cirque royal, les Nuits mettaient en lumières deux artistes rares, deux groupes dont l’histoire s’est écrite sous les serres du Botanique depuis plusieurs années : Phosphorescent et Andrew Bird.
Sur l’affiche de cette 15e édition, les noms de Phosphorescent et d’Andrew Bird résonnent comme l’aboutissement d’un travail de fond, un pari gagné à l’aune des années. Witloof Bar. Rotonde. Orangerie. Voilà bien le chemin infaillible, celui qui mène vers le sommet, au Cirque Royal, dans la cour des grands.
L’Amérique
L’Amérique, fantasmée et fantastique, se cache sous les contours étincelant de Phosphorescent. Le groupe de Matthew Houck retrouve ainsi le public des Nuits après une année d’abstinence. Alors, forcément, les retrouvailles sont intenses.
Le New-yorkais entame l’échappée belle sur ‘At Death, A Proclamation’. Entre folk contemplatif et rock mystique, Houck pose sa voix hypnotique et réforme une certaine idée des poncifs yankees. Pour s’en convaincre, il suffit de suivre le cheminement du chantre barbu qui, sur scène, revisite essentiellement ses deux derniers disques. Les titres du formidable ‘Pride’ trouvent un écho favorable auprès d’une audience magnétisée par le charisme du barde de Brooklyn. Accompagné de son groupe, Matthew Houck vise dans le mille à plus d’une reprise, notamment sur ‘Wolves’, morceau exceptionnel sur lequel le chanteur déploie les mystères de sa voix et libère la chorale qui le hante.
Ce soir, Phosphorescent se confie, affiche ses origines, son héritage patriotique. Bouteille à la main, Houck va et vient sur les planches et entonne ‘Reasons To Quit’, plage d’ouverture de ‘To Willie’, récent album de reprises entièrement consacrées à la figure tutélaire de Willie Nelson. Dans ces moments-là, la musique de Phosphorescent se risque au clash culturel, en s’aventurant sur les pistes de la country, en suivant les traces de ce vieil « hors-la-loi ». Moins captivants, ces morceaux terrassent charme et émotions pour laisser place à une certaine forme de démonstration. Charismatique, Houck s’en tire toutefois avec les honneurs.
Une formule improbable
Un gramophone à double oreille pour tout décor, Andrew Bird investit la scène. Avec le temps, ses chansons ont trouvé une place de choix dans le cœur des auditeurs. La clef de cette histoire d’amour tient en une formule improbable où l’être humain se fait à la fois chanteur, violoniste, guitariste et siffleur de luxe. À lui seul, Andrew Bird redéfinit le concept d’homme-orchestre. Cravate, costume sombre, le Chicagoan impose sa classe naturelle et brosse des chansons naturalistes complexes qui, toujours, caressent l’évidence mélodique, l’essence de la pop music. Bird, drôle d’oiseau, pépie, fait feu de tout bois et démultiplie ses pièces orchestrales à l’envi.
Une guitare en bandoulière, un violon dans les mains, l’artiste s’agite, saute d’un micro à l’autre, sautille sur ses pédales de sample, décuple les harmonies et s’envole pour d’impressionnantes montées épiques, voire baroques. Mais à trop vouloir en faire, Andrew Bird verse parfois dans la figure de style, dans une caricature de sa propre personnalité artistique.
Médusée par tant de dextérité, la foule reconnaît néanmoins les forces de l’animal. Touchant quand il balbutie quelques mots en français, capable de culbuter les genres (du rock au folk en passant par la country et l’opéra) pour percer de purs instants de magie (‘Oh No’, ‘Imitosis’), l’Américain reste capable de prouesses vocales incomparables et siffle comme personne. Haut, très haut.
NICOLAS ALSTEEN
Francois
10 mai 2009 à 16 h 43 min
Et bien moi, je suis venu au Cirque Royal pour voir la jeune Laura Marling. Sa prestation fut trés belle. Je suis ravi.
Par contre, la musique de Phosphorescent m’a fait fuir le Cirque Royal après 3 morceaux. Vraiment, vraiment pas mon truc! Il en faut pour tous les goûts…
Noah Dodson
11 mai 2009 à 17 h 18 min
Il est devenu rare que Matthew Houck joue “Wolves” quand il joue ici, dans sa ville. J’avoue que je suis un peu jaloux. “Pride” restera, a mon gout, un des meilleurs albums de 2007.
Marc
12 mai 2009 à 11 h 16 min
Alors que tout commençait bien avec deux titres profonds et sombres à souhait, le concert de Phosphorescent a basculé alors avec ces deux reprises de Nelson. Pour ne jamais revenir. Comme avec beaucoup de groupes américains revisitant certaines sources (de Band Of Horses à Wilco en passant par tous les projets de Conor Oberst, Vetiver et tant d’autres), on constate que la limite est très ténue entre superbe et anodin. Je classerais cette prestation dans la seconde catégorie sans hésiter.
Andrew Bird a été aérien, plaçant son inoxydable répertoire avec talent. Mais trop de maestria amène parfois un peu de complaisance.
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