Depuis l’an dernier, il faut faire un choix pour le week-end incluant le 21 juillet : Dour ou Spa. À moins de faire des allers-retours. Ce qui est assez rare, sinon de la part d’artistes belges programmés à l’ouest comme à l’est du pays.
Cela dit, les deux festivals ne sont pas de vrais concurrents. Leur identité, au fil des ans, n’a fait que les différencier. Aux Francofolies de Spa, plus qu’ailleurs sans doute (de Werchter aux Ardentes de Liège), il n’y a pas que la musique. Il y a une ville, dont le festival occupe la quasi-totalité du centre, rendu piétonnier pour l’occasion.
Il y a les scènes ouvertes aux amateurs. Il y a les « bars en folie », ouverts de jour comme de nuit aux concerts live. Il y a les nombreux rendez-vous à l’intention des professionnels : tables rondes, déjeuners au jardin pour présenter un artiste, conférences de presse de labels, apéro-débats sur la situation de la musique, du business et du développement des artistes belges.
Il y a les nombreuses réceptions aussi, destinées aux innombrables VIP. Quand ce n’est pas un ministre de la Région wallonne ou de la Communauté française, il s’agit de la RTBF ou des Québécois, voire le Commissariat aux relations internationales… Autant d’opérations de relations publiques passant au-dessus de la tête… du public justement mais qui attirent pas mal d’acteurs culturels et politiques. Chaque parti envoie d’ailleurs à Spa ses barons, histoire de se montrer, de voir si les généreux subsides sont bien utilisés, et enfin, de se reposer après une saison éreintante.
Car, malgré tout, il y a des concerts. Plus de 250, pour être précis. L’an dernier, les organisateurs ont annoncé la présence de 200.000 personnes, pour la quinzième édition. À supposer que les 25.000 porteurs quotidiens de bracelet au Village soient différents chacun des cinq jours de festival. Ce qui est faux, bien sûr.
Les Francofolies de Spa restent le havre de la chanson française et des artistes belges. Même ceux, flamands ou francophones, qui s’expriment en anglais : soyons tolérants !
Rap, rock et électro sont évidemment les bienvenus. Mais cette année, plus que jamais sans doute, il existera comme un fossé entre le public venu applaudir les artistes de la scène Pierre Rapsat (la plus grande, celle de la place de l’Hôtel de Ville) : Francis Cabrel (pour la première fois !), Patrick Bruel, Maxime Le Forestier, Julien Clerc, ou Adamo, et ceux du Village Francofou, plus rock’n’roll. Les Wampas, Front 242, Trust, Arsenal, Soldout, IAM, Joshua… y attireront les plus jeunes festivaliers. Bénabar et Olivia Ruiz seront, eux, plus fédérateurs, lundi et mardi.
Au-delà du côté festif – avec l’ambiance foire aux boudins qui n’est pas désagréable quand il ne pleut pas – les Francos de Spa sont devenues, au fil des ans, essentielles pour les artistes débutants (le Franc’Off est un concours prisé de tous), jeune public (les Francos Juniors) ou tout simplement belges. Si tous les artistes présents, stars ou non, se contentent d’offrir un set similaire à ce qu’ils proposent ailleurs tout l’été (c’est le propre de tout festival estival, notez), pour les Belges, il s’agit, en sus, d’augmenter leur visibilité et leur notoriété dans une région du pays qu’ils ne visitent pas forcément.
Public familial et public très jeune sont le moteur d’une manifestation devenue incontournable également pour l’économie de la ville et de la région. Car, aujourd’hui, qui dit festival de musique, dit aussi tourisme. Et de ce côté-là, la perle des Ardennes n’a plus rien à prouver.
Toutes les photos du festival (Photos : Sylvain Piraux, Belga)
THIERRY COLJON