Le coup du chapeau

lesoir2.JPGIl s’est passé quelque chose, jeudi, en début d’après-midi, au Dance Hall pendant le concert de Chapelier Fou. Le violoniste et électronicien français a séduit un public aussi nombreux qu’enthousiaste. Rencontre. Avec son nom emprunté à Alice au pays des merveilles, le Français Louis Warynski, alias Chapelier Fou, a salué de manière presque magique son entrée dans les bacs de disquaires. 613, premier album au titre énigmatique, a révélé un artiste, on peut même écrire un artisan, à l’univers féérique et mélancolique, qui aime les cassures et étrangetés. Bavardages deux heures après son concert.

– On a été surpris par l’enthousiasme qu’a suscité votre concert dans un endroit qui ne lui semblait pas particulièrement propice.
« Les festivals a priori, c’est pas ce que je préfère mais je ne m’attendais guère à pareil accueil. Je ne joue pas forcément les mêmes morceaux qu’en club. On va aller droit au but. En festival, tu peux proposer des trucs un peu plus bourrin. J’évite les petits bazars acoustiques et dans l’écoute du son pour jouer sur l’énergie. En même temps, il y a un noyau commun. Des morceaux qui ont la patate et en même temps un côté sensible. »
– Paraît que vous voulez faire de la musique sérielle d’ascenseur. Ca veut dire quoi ?
« Je devais vouloir dire que je me prends vraiment la tête dans la composition. J’ai des concepts avant d’aborder un morceau. Avant qu’il existe. Mais je veux que le résultat soit hyper accessible. Je veux un fond sérieux et un vernis, ou du moins une enveloppe, qui ne demande pas nécessairement de faire d’efforts. Même si après, on peut quand même écouter ma musique en se prenant la tête. En s’intéressant au mix, à la construction. »
– Vous venez du classique ou de l’électro ?
« Moi, j’ai grandi au conservatoire. J’ai toujours voulu jouer tzigane. Je m’appelle Warynski. J’ai du sang slave. Une musique qui était plus présente du côté de chez mes grands parents qu’à la maison. Chez moi, j’avais des milliers de disques. Toute la musique classique. Beaucoup de world aussi. Et énormément de rock. Il y avait tous les disques qu’il faut. Je piquais dans la collection du père. Quand je me faisais chier, allez hop, je partais dans le rayon (tout était classé par thèmes) au hasard musiques du monde. J’ai découvert la kora et les trucs pygmées comme ça. Puis, tiens, je vais écouter du Mozart. Ca me fait chier. J’oublie. J’essaie Debussy. Révélation. Révolution. Je sais que j’aime pas les Rolling Stones mais Pink Floyd me fout une claque. J’avais la médiathèque à portée de main. »
– Pourquoi le violon ?
« Le violon, c’est la musique tzigane par excellence. Tu peux t’amuser. Déconner. Glisser. C’est une école de la liberté. Une école du sale. Un des groupes que j’écoute le plus, c’est Sonic Youth. Je ne fais pas de la musique sale mais elle m’influence beaucoup. En même temps, je suis autant marqué par les guitares saturées de Sonic Youth que par les morceaux pré-calculés de Autechre. Le groupe qui a le mieux évolué au monde. Il y a des sons ignobles mais ils ont vraiment leur place… J’ai énormément écouté Aphex Twin et Boards of Canada aussi. Mais maintenant je suis plus dans la musique contemporaine et le rock. »
Votre album s’appelle 613. J’ai même lu que vous aviez des stats sur les probabilités de gestation de vos chansons (environ 12% de vos idées émergeraient). Vous avez une vision mathématique de la musique ?
« Pas seulement. Mais sans doute oui. Je suis obnubilé par la musique aléatoire. Je m’en sert pas mal. Notamment pour varier mes rythmiques. Moi-même en concert, je ne sais pas toujours ce qu’il se passe. »

Julien Broquet


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