C’est peu d’écrire que le live de Gonjasufi était fort attendu : depuis la sortie de son premier album chez Warp (l’irrésistible « A Sufi and a Killer »), tout le monde s’excite sur cet étrange renard du désert.
On parle de lui comme d’un chamane mi-Bboy mi-hippie, qui kiffe autant le blues du bayou (d’où son T-shirt à l’effigie de Robert Johnson) que la musique orientale, l’indie US à la Pavement que la transe « beat » façon « Lettres de Tanger ». Ce disque halluciné, c’est du cut up de références a priori contraires : ça part un peu dans tous les sens mais bizarrement ça marche, c’est cool, et on en redemande. Voilà donc pour le dithyrambe.
(Un ange passe)
C’est la fin du concert de Gonjasufi, et on hésite tout d’un coup à effacer le paragraphe qui précède. Quelle amère déception. Notre barbu s’est vautré en beauté devant un public d’abord interloqué, puis juste démissionnaire. Deux-trois morceaux à vau-l’eau, et le Chateau se vide : pour la claque annoncée, il faudra donc repasser. La faute à qui, à quoi ? A ce dj qui balance les pistes comme si c’était un examen de passage ? Au manque d’expérience live de notre soufi en chef, l’air tout penaud sous la chaleur des projecteurs ? Aux problèmes techniques (le son, flottant, médiocre) ? Toujours est-il que Suman Ecks (son vrai nom) n’a pas encore trouvé ses marques sur scène : c’est hésitant, laborieux, d’une platitude à l’exact opposé de ce qu’on voulait entendre. Circulez, y a rien à voir. La prochaine fois on se contentera du disque à la maison, en faisant ce vœu pieux : que ce concert frustrant ne nous ôte pas le plaisir de le réécouter, avec plaisir et sans mauvais souvenir.
ESCOUFLAIRE,GREGORY