Les cinq Ecossais de Mogwai constituent l’un des grands groupes de la scène post-rock. A l’heure où sort leur septième album, ils méritent toujours leur piédestal.
My goodness, quel accent à couper au couteau ! Au taille-haie, même ! S’il ne s’entend pas sur disque ou sur scène, vu la quantité d’instrumentaux, quand Stuart Braithwaite et John Cummings répondent à nos questions, il y a intérêt à s’accrocher. Même si les deux guitaristes du groupe de Glasgow ne sont pas les plus bavards du monde… entre les éclats de rire qui émaillent leurs commentaires à propos de Hardcore will never die, but you will, disque mis en boîte en cinq semaines par un groupe dont deux des membres se sont expatriés. Pas simple, mais très plaisant, à les écouter…
Quel a été le point de départ de ce nouvel album ?
Stuart : L’idée de base, c’est toujours plus ou moins d’écrire de la bonne musique. Après, quand le travail commence, il y a toutes ces différentes choses qui nous excitent et qui jouent d’une certaine manière sur l’écriture et sur la composition.
C’était quoi, le plus excitant ?
John : Après coup, nous avons constaté avec amusement que tous les nouveaux morceaux – nous en avions écrit 21 au total –, ont en commun un petit quelque chose d’étrange, de presque pop : ce sont des morceaux plus rapides, ou peut-être un peu plus joyeux… C’était drôle.
Stuart : Nous avons expérimenté la joie !
« Joie », le terme n’est pas courant dans votre vocabulaire…
Stuart : Pas particulièrement…
En même temps, il y a toujours ce quelque chose d’uplifting, dans votre musique, même dans les compos les plus sombres.
Stuart : Qu’il s’agisse de notre musique ou de celle que nous aimons chez les autres, nous recherchons toujours le petit grain de magie qui s’y cache.
Et chez Mogwai, quand sait-on qu’on tient un petit quelque chose de magique ?
John : Mais il n’y a rien de volontaire là-dedans… Il nous est juste plus facile de dire quand quelque chose ne va pas. Quand tout le monde est content du morceau et vient de le jouer sans erreur, c’est que ça doit être bon.
Donner un titre à des plages instrumentales est toujours aussi amusant ?
Stuart : Oui, même si cette fois, nous avons eu du mal avec le titre de l’album. Ça nous a pris un an ! Et là, c’est le mieux que nous ayons pu trouver !
Si je vous dis « Hardcore will never die, but you will », qu’est-ce que ça suscite comme images ?
John : Hum… Difficile à dire, mais ça nous semblait juste, comme titre.
Stuart : La plupart des titres de nos bons albums ont un petit quelque chose de sinistre mais aussi un élément amusant, en tout cas pour nous. Ici, nous aimions autant l’illustration que le titre, et c’était le plus important à nos yeux. Maintenant, pour être honnête avec Antony à qui nous devons la photo de la pochette (NDLR : Antony Crook, également réalisateur d’un court-métrage intitulé Thirty century man, consacré à un cycliste au long cours, James Bowthorpe, et accompagné en musique par le « How to be a werewolf » de Mogwai), précisons qu’il voulait faire quelque chose de joli, mais il s’est finalement retrouvé avec une image un peu sinistre aussi.
Qu’en est-il de ce morceau, « The singing mountain », inclus dans la version limitée de ce nouvel album ?
John : Il s’agit d’un long morceau, sans chant, même s’il s’intitule The singing mountain… On y entend un quatuor à cordes, un piano, quelques guitares, une basse et une batterie. C’était la bande-son d’une installation exposée en Allemagne et représentant une montagne à l’échelle… Enregistrer ça n’a pas été facile, à cause du volcan : c’est Barry qui avait écrit la musique et il n’a pas pu revenir à temps, et puis nous n’avons pas pu aller la voir non plus parce que nous devions entrer en studio pour l’album…
DIDIER STIERS
Hardcore will never die, but you will
A propos de magie… Les garçons de Glasgow, pour ce nouvel album à nouveau produit par Paul Savage (Mogwai Young team) et auquel a contribué leur camarade violoniste Luke Sutherland, de la magie donc, ils en ont trouvé encore assez que pour faire étinceler 10 magnifiques compositions. A l’image de ce « White Noise », une plage d’ouverture qui invite à la rêverie mais qui n’en est pas moins agrémentée de discrètes touches de guitares abrasives. Ou à l’image, aussi, du majestueux « Rano pano », dont l’émotion dégagée serre véritablement la gorge. Elles brillent toutes par la richesse et la subtilité de leurs textures. Au casque, c’est même une expérience unique… sans cesse renouvelée ! Les rares voix qu’on y entend sont synthétisées, de même que certaines rythmiques (« Mexican grand prix », plutôt krautrock), ce qui ajoute encore aux atmosphères uniques que Braithwaite & co ont suscitées. Ici et là, ils augmentent aussi un peu la dose d’électronique, tout en ne se privant pas d’une bonne compo rock et rageuse, comme ce « San Pedro » qui survient à mi-parcours. Et le temps de s’offrir une respiration quasiment intimiste menée par un piano (« Letters To The Metro »), ils repartent de plus belle dans les envolées hypnotiques et les montées en puissance. Quinze ans après ses débuts, Mogwai sort une fois de plus du lot avec, c’est le plus beau, un album finalement assez accessible. Pas étonnant que le concert du 26 mars à l’AB soit déjà complet ! (*Rock Action/PIAS)
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