Coldplay, à la maison, défend sa musique


Coldplay publie le 24 octobre son cinquième album, intitulé « Mylo Xyloto ». Nous avons rencontré, dans son studio londonien, le plus gros vendeur de disques du moment.

Le studio de Coldplay, situé dans la banlieue nord de Londres, n’a pas beaucoup changé depuis notre dernière visite, pour la promotion de l’album Viva la Vida or Death and All His Friends, en 2008. Quelques graffitis en plus sur les murs, ça oui. Après avoir croisé Chris dans l’escalier, avec une chaussure rouge et une autre bleue aux pieds, aux lacets jaunes, on apprendra que tous les membres du groupe aiment la couleur et peignent ensemble.

Chris se chargeant des télés (normal, c’est lui la star, le chanteur, le mari de Gwyneth Paltrow, le père de ses enfants, etc.) et Johnny ayant été notre dernier interlocuteur, on hérite cette fois de Guy et Will, bassiste et batteur de Coldplay.

On est content de les rencontrer. Le problème, c’est que leur firme de disques ne nous a autorisé à écouter, en streaming, que six titres dont les singles déjà connus, « Every teardrop is a waterfall » et « Paradise ».

On se débrouille donc. On ne va pas faire le difficile avec le groupe qui, depuis X&Y en 2005 et Viva la vida, est devenu le plus gros vendeur de disques au monde : 8,5 millions de copies écoulées pour le premier et 6,8 pour le second.

C’est la première fois que vous donnez des interviews après ne nous avoir fait écouter que la moitié de l’album. Est-ce stratégique ?

En fait, la raison principale est que nous ne l’avons pas fini. On y est presque, c’est une question de jours mais tant que le mixage et le mastering ne sont pas terminés, on préfère ne pas vous faire écouter les morceaux restants. On travaille toujours jusqu’au dernier moment.

Ceux que nous avons écoutés et que vous avez d’ailleurs déjà joués cet été en festivals, nous sont très familiers. Ils sont très « Coldplay », pas très surprenants. Les autres sont du même acabit ?

Non, mais on ne se sentait pas prêts à les interpréter sur scène. On voulait y toucher jusqu’à la dernière seconde. Elles ne sont pas très différentes, disons qu’il y a aussi, comme toujours chez Coldplay, des moments plus calmes, plus acoustiques…

Ce que nous avons entendu est du Coldplay pur jus, déjà entendu presque. Comme si vous évitiez à tout prix de vouloir choquer votre public… On ne peut guère parler de cassure ou de prise de risques…

Je vois ce que vous voulez dire. C’est notre façon d’écrire une chanson, c’est notre essence pure. Mais je pense que, pour ce disque, comme les précédents, on a essayé différentes nouvelles façons de faire sonner notre musique. C’est nous bien sûr. Nos chansons doivent nous ressembler et donc, oui, elles seront familières à ceux qui aiment Coldplay. Même si notre inspiration est plus variée…

En faisant appel aux mêmes producteurs, Brian Eno et Markus Dravs, en travaillant dans votre studio, de la même façon, aviez-vous l’idée de préserver une certaine continuité avec « Viva la vida » ?

Oui, on peut dire ça comme ça même si nous, de l’intérieur, on note de nombreuses différences avec notre précédent disque. Brian par exemple, est venu mais nettement moins souvent. Markus a davantage pris les choses en main. Même si les gens et l’endroit ont été les mêmes, les sessions pour cet album ont été complètement différentes des précédentes. Pour Viva la vida, c’était un vrai champ de mines. Ici, on a utilisé de nouveaux instruments aussi. D’un point de vue stylistique, ce disque est très différent de Viva la vida. On est désolés mais en fait, en voyant la liste, les chansons que vous n’avez pas encore entendues sont très différentes. Mais cela reste des chansons avec des mélodies, comme on l’a toujours fait.

Est-ce la fin d’une période pour vous ? Je vous demande ça parce que Chris a dit dans une interview que les paroles de ces nouvelles chansons reflétaient les tensions au sein du groupe ?

Contractuellement, on a encore deux albums à livrer à EMI. Quant aux tensions, ça a toujours été comme ça. Et ces deux dernières années ont certainement été les plus heureuses pour chacun d’entre nous. Parce qu’on est plus vieux, qu’on se connaît mieux… On trouve plus facilement la bonne atmosphère pour faire de la musique ensemble. Mais la fin de quelque chose ? On traite chaque album comme s’il s’agissait du dernier. On ne garde rien en réserve pour le suivant. Tout ce qu’on a, on le met sur le disque. Donc celui-ci est le dernier, comme l’était le premier.

Les tensions ne viennent-elles pas du fait que Chris cherche trop souvent à imposer ses idées aux trois autres qui tiennent à garder leur importance au sein du groupe ?

Oui, c’est un peu ça le problème pour être honnête. Chacun ressent une certaine difficulté à imposer ses idées. On est quatre, donc il faut faire des concessions. On n’a pas tous la même idée. Certains veulent être plus pop, d’autres plus aventureux. Mais le danger réside aussi dans la tentation de vouloir faire plaisir à tout le monde. À la fin, vous vous retrouvez avec un disque qui n’a pas de direction. Aujourd’hui, quand il y a désaccord entre nous, on discute et concède plus facilement. Avant, c’était plus dur.

Sur les blogs rock, comme celui de notre journal, les réactions à tout ce que propose Coldplay sont parfois très violentes et agressives. La plupart disent avoir aimé les deux premiers albums seulement. Le problème, selon vous, est-il votre succès planétaire ou votre musique qui a évolué vers quelque chose de plus triomphant, exubérant ?

Qui sait ? C’est pareil en Angleterre. On y pensait encore ce matin. Ce sont souvent des gens qui sont de grands fans de musique et qui prétendent devenir ou être des critiques musicaux. Les gens aiment découvrir un groupe et se l’approprier. Une fois que ce groupe devient plus reconnu, plus populaire, ils se sentent dépossédés. Ce groupe n’est plus leur petit secret. On a vécu ça, surtout en Angleterre qui est typique de ce genre de choses.

Le « Times » a écrit que le manque de subtilité de Coldplay peut être « uninspiring » mais que votre respect pour les fans est évident

C’est assez dur. C’est pour ça qu’on essaie de ne plus lire la presse. On sait qu’il y a plein de gens qui n’aiment pas notre musique. C’est la vie. On est incroyablement chanceux d’avoir autant de fans qui aiment notre musique. C’est fabuleux. On fait de la musique pour eux et pour nous-mêmes. On ne peut rien faire pour convaincre ceux qui ne nous aiment pas, c’est comme ça. Chacun se sert de la musique pour exprimer ce qu’il est. C’est pour ça que la musique est merveilleuse. C’est la meilleure forme d’expression.

Vos deux derniers albums ont été les plus vendus dans le monde chaque fois. Est-ce une pression supplémentaire pour vous ? Vous n’osez pas décevoir votre public. Vous ne pouvez pas être Radiohead. N’est-ce pas un peu frustrant ? Le succès peut aussi être une contrainte…

Si on voulait faire un album expérimental, on le ferait. Définitivement. On ne se sent pas chaque fois obligés d’être en tête des charts. Pas du tout. On fait la musique qui nous plaît. Sans penser à rester populaires. Un disque n’est pas une garantie. C’est aussi simple que ça.

Le titre de l’album, « Mylo Xyloto », venons-y. Qu’est-ce que ça veut dire pour vous ?

Ça veut tout dire. C’est une phrase qui n’existait pas et maintenant elle existe.

Selon Ricky Wilson, de Kaiser Chiefs, le Myloxyloto se trouve dans l’Actimel…

Qui est Ricky Wilson ? Je crois que c’est une de ses blagues. On a eu différentes phases dans l’enregistrement de ce disque. Et Mylo Xyloto est une sorte de relique d’un concept qu’on a eu pour ce disque. Une sorte de personnage. Ce disque est comme un soundtrack d’une histoire qui n’existe pas encore mais que vous cherchez. Tout ça est mystérieux mais on n’a pas de réponse définitive.

Le titre est-il aussi relié au graphisme de David Carter ?

David Carter est un designer de pop-up, un artiste 3D. Les graffitis que vous voyez sur le mur devant vous, c’est un tableau conçu par nous quatre en même temps. On a peint tout un mur comme ça.

De peindre ensemble est une bonne manière d’éviter la séparation car vous ne pouvez pas vendre les tableaux sans l’accord des trois autres…

C’est vrai. C’est fun à faire. En peinture, comme en musique, on cherche à s’exprimer dans un monde assez sombre, difficile et gris. On essaie d’y apporter un peu de couleurs. La couleur nous inspire. Apporter une couche d’expression artistique sur ce monde déprimant nous excite beaucoup.

Comment avez-vous vécu les émeutes de cet été, ici à Londres, dans cette banlieue nord ?

Ici, c’était assez calme comparativement à d’autres quartiers mais oui, au coin de la rue, ça a tout de même pété un peu. Nos chansons étaient déjà écrites. On est touchés par les problèmes sociaux des gens mais ici, derrière ces émeutes, il n’y avait aucune autre motivation que celle de voler. Il n’y avait pas d’agenda politique. C’est plus l’expression d’une désillusion face à une société de consommation massive. On comprend cette frustration bien sûr. Mais pour tenter d’améliorer le monde, je pense qu’il vaut mieux faire de la musique que de voler.

Cet été, on vous a vus sur certains festivals d’été, longtemps avant la sortie du disque. Pourquoi ? Pour tester les nouveaux titres ?

En partie. On adore les festivals et l’année prochaine, on ne pourra pas les faire car on aura nos propres shows. Mais oui, c’était une bonne façon de jouer nos nouvelles chansons, de les tester sur les gens et aussi de leur dire qu’on était de retour. Cela faisait longtemps qu’on n’avait plus joué des festivals. On essaie toujours de faire les choses au mieux. On contrôle mieux les choses en intérieur mais les open air nous procurent aussi beaucoup de plaisir. Une ambiance spéciale, plus imprévisible, en fonction de la météo, de l’heure…

Le 24 octobre sort votre album mais aussi celui de Noel Gallagher. Vous cherchez à susciter une nouvelle guerre ?

Non, on ne combat pas Noel qui est un chouette type. On est du même côté. On est très fans d’Oasis.

Coldplay, c’est toute votre vie…

On a aussi le temps de faire d’autres choses : suivre des cours de pilotage d’avion ou restaurer de vieilles voitures. Je ne pense pas qu’il soit difficile pour les fans de trouver l’adresse de notre studio mais ceux qui viennent sont encore assez sympas. On vit une vie normale. On adore ce quartier calme. C’est parfait pour nous. On a la chance d’avoir des fans qui nous respectent.

THIERRY COLJON



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3 Comments

  1. Pietou

    19 octobre 2011 à 9 h 35 min

    En plus de plagié Joe Satriani de façon flagrante, ils plagient “Rythmo de la dolce”… Franchement, ça devient une simple machine à fric. Je pensais qu’ils étaient bien plus créatif… je suis très déçu.

  2. bd

    19 octobre 2011 à 12 h 46 min

    Qu’il est loin le temps où Coldplay faisait de la “bonne musique” ! De “Parachutes” au “Rush of Blood to the head”, j’appréciais le vent nouveau que soufflait ce petit groupe britannique qui, à l’instar de Bono, couplait son image avec un message – fut-il purement un outil de com et/ou un peu galvaudé…
    Mais Coldplay c’est un peu fini . Déjà le dernier opus laissait un peu à désirer, tirait un peu trop sur la corde mélo-facile. Mais ici, pardon ! Des mélodies tartes à la crème, peu d’inventivité, des refrains formatés pour une salle de 50.000 fans gueulant des “woo hooo wooo” , des duos improbables (qui eut cru il y a 10 ans qu’ils chanteraient un jour avec Rihanna ?!?). En tous cas, tout ce qui sort de ce nouvel opus ne m’a pas l’air de bonne augure. Coldplay, finalement, ça doit être comme le beaujolais nouveau, rafraichissant et réjouissant au début, infect au bout de quelques années…
    Allez, il nous restera Thom Yorke.

  3. toto

    25 octobre 2011 à 8 h 45 min

    @bd :”qui eut cru il y a 10 ans qu’ils chanteraient un jour avec Rihanna ?!?”

    euhh…. il y a 10 ans Rihanna avait 12 ans :=)

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