Justice à l’AB? Grosse soirée en perspective. Et de fait, les électroniciens français n’ont eu aucun mal à retourner une Ancienne Belgique remplie jusqu’au dernier centimètre carré. Croix iconiques tendues vers le ciel, cris hystériques, fumée bleue ou verte et odeurs de houblon et de sueur ont pris possession de la salle. Si bien qu’on se serait cru à un concert de rock à l’ancienne. Enfin presque…
Attendu comme le loup blanc dans les Pyrénées, le deuxième album de Justice avait quelque peu décontenancé, pour ne pas dire déçu, à sa sortie. Alors qu’ils attendaient un nouveau brûlot dance, les fans ont découvert avec «Audio, Video, Disco» un «disque de rock progressif joué par des gens qui ne savent pas jouer» comme l’ont défini les premiers intéressés. Et c’est effectivement de cela qu’il s’est agi hier soir. Sauf que le mix a remplacé les jams et soli de guitares. Reste ces changements de rythme incessants qui peuvent s’avérer frustrant pour qui veut entrer corps et âme dans le son…
Mais revenons au commencement. Au commencement était la croix. Lumineuse et imposante au centre de la scène. Derrière, un mur de machines, tables de mix, que sais-je! Et sur les côtés, deux murs gigantesques d’amplis Marshall (ça rappelle quelque chose?). Le light show est simple mais parfait, avec des guirlandes de néons qui s’illuminent totalement ou partiellement, en blanc ou en rouge vif. Enfin, les deux justiciers, sans mot dire derrière leur table magique, en cuir noir et clope au bec, tels des rock stars, envoient les sons qui doivent nous amener à un dérèglement de tous les sens.
La première partie du concert sera faite de hauts et de bas. Littéralement. Entre montées acides et redescentes trop rapides, le duo s’amuse avec les rythmes et les basses, énormes et claires, pour quelques séances de montagnes russes. Justice chipote d’abord avec le thème de ‘Civilization’ pendant une dizaine de minutes avant d’envoyer le morceau en entier. Ces montagnes russes, un peu faciles, un peu mise en jambe, un peu frustrantes, dureront pendant une demi-heure-trois-quarts d’heure. A ce moment, la moitié de la salle est déjà bien partie pour atteindre la lune, entre danses frénétiques et crowdsurfing; l’autre moitié est occupée à filmer ce qui se trame devant elle dans le monde réel. Un phénomène culturel dont on a pas encore saisi tout l’intérêt, surtout quand il empêche le voisin de se déhancher… Passons.
Arrive alors la lumière rouge. La passage à la vitesse supérieure. Il y avait déjà eu le tube ‘D.A.N.C.E.’, arrivé un peu trop tôt dans le set. Surtout, les fusibles ont bien sauté avec le magma de bruit blanc qu’est ‘Stress’, du genre à faire passer Sonic Youth pour Leonard Cohen. Là, les néons et amplis passent au rouge et le concert en quatrième jusqu’à ce que le duo, l’un à l’avant scène, l’autre derrière, stoppe brusquement les machines et reste le bras levé, les doigts en V, immobile pendant cinq bonnes minutes durant laquelle la foule atteint l’orgasme. Rock stars, on vous dit. Où plutôt DJ stars. Et d’enchaîner sur ‘We are your friends’ (au départ un remix de Simian, aujourd’hui un tube imparable) qui, vous l’imaginez bien, a fait son petit effet. Justice termine le set sur ‘Audio Video Disco’ et sa grosse ligne de basse, soit un des meilleurs single rock de 2011 avec le ‘Lonely Boy’ des Black Keys.
Il y aura bien un rappel, le refrain de ‘We’re your friends’ scandé par la foule, le dernier single en date ‘On n’ On’ et à nouveau ce refrain « We. Are. Your friends. You. Will never be alone again. Oh Come on! Oh Come On! Oh Come Oooon! » repris dans la nuit. Voilà. Rien à redire. La Justice a fait son boulot.
Didier ZACHARIE
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