Lambchop : sur du velours

Doux comme un agneau, côtelé comme du velours, le concert de Lambchop était à la hauteur des attentes, vendredi soir, dans un Botanique surchauffé. Leader charismatique de la formation de Nashville, Kurt Wagner est venu raconter les chansons de‘Mr M’ : splendide album dédié à la mémoire de son ami Vic Chesnutt. Un hommage vibrant et terriblement vivant.

Casquette vissée sur ses lunettes, chemise blanche, costard noir, Kurt Wagner a la classe américaine. Dandy du peuple, chanteur du cœur, le boss de Lambchop empoigne sa guitare et s’installe confortablement sur une chaise. Il n’en bougera plus. Il pose alors sa voix grave sur les souvenirs : de bons moments, encore frais, savamment orchestrés et subtilement mis en lumière par cinq musiciens dévoués à ces mélodies mélancoliques. Ce soir, les chansons de Lambchop s’élèvent en hommage à la mémoire de Vic Chesnutt (1964-2009), chanteur oublié, artiste perdu et ami de toujours. L’album ‘Mr M’ lui est dédié. L’essentiel du concert également.

Kurt Wagner jongle avec les idiomes sacrés de la culture yankee. Car sa musique, elle, vient de là : elle vient de Nashville. Haut lieu de pèlerinage country, berceau de la chanson américaine, l’endroit protège scrupuleusement son image, préservant son histoire et ses annales grâce au travail de quelques acharnés, ambassadeurs dévoués du savoir-faire local. Johnny Cash a rendu l’âme à Nashville, Jack White a choisi d’y vivre. Le leader de Lambchop, lui, fait plutôt figure de gardien du temple. Dès qu’il peut, Wagner précipite son concert en territoire country. À Nashville. On y revient toujours. Ce mec est un obstiné, le dernier défenseur d’une cause probablement perdue. Le combat en devient encore plus héroïque. Presque romantique. Avec le temps, on ne s’étonne même plus de l’invitation récurrente suggérée dans les albums de Lambchop : « Visit the country Music Museum in Nashville, TN ». Si un jour on passe par là, promis, on n’y manquera pas. En attendant, on est là, plongé dans l’obscurité et la chaleur d’une salle privée d’air. Kurt Wagner a demandé de couper la ventilation. Pas question que les engins interfèrent avec sa musique. Chaleureuse, passionnante, elle nous prend à la gorge. Les orchestrations sont feutrées, l’atmosphère est intimiste. Kurt Wagner revêt son costume de crooner et séduit la pop du haut de ses bons mots. Sa voix grésille au coin d’un feu invisible. On est debout, mais on s’allongerait bien volontiers sur un canapé pour écouter ce vieil ami qui nous rassure et nous apaise. Visions cinématographiques et espaces contemplatifs se relaient pour entraîner une musique élégante et exigeante vers les sommets

Kurt Wagner s’érige ici en pur « rétromaniaque » : il recycle les souvenirs et une musique antique. L’artiste s’appuie sur le passé pour redessiner la mode. Avec la prestation cinq étoiles livrée hier soir par Lambchop, le choix entre le costard cravate et le costard casquette ne se pose même plus.

Nicolas Alsteen

Setlist :

Intro
If Not I’ll Just Die
2B2
The Good Lifed (Is Wasted)
Kind Of
Gone Tomorrow
Betty’s Overture
Mr. Met
Nice Without Mercy
Buttons
Never My Love
The Saturday Option
My Blue Wave
The Man Who Loved Beer
Bon Soir, Bon Soir
Guess I’m Dumb
Up With People
Give It (Once In A Lifetime)

[youtube v6ud2VPvin4]


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