Planning bien chamboulé pour cause de décès sous la boule à facettes : la soirée de jeudi au Cirque se résume en ce qui me concerne au seul Woodkid. Dans la salle en configuration « demi », le petit barbu à casquette a aussi promis de revenir plus tard dans l’année avec des femmes et des hommes nus. L’émotion, sans doute ?
Type de pub, clippeur et graphiste, Yoann Lemoine de son vrai nom est incontestablement un grand consommateur de soundtracks. En plus d’aimer les images, se dit-on à l’heure où il monte sur scène, après une intro au parfum de péplum : lumière crue, roulements de tambours, musiciens solennellement figés devant leurs consoles, un vrai tableau !
Avouons-le, d’emblée, il étonne et intrigue. Avec ces « Baltimore’s fireflies » et « Boat song », leur piano et leurs cuivres. Trompette, cor et trombone ne sont pas les instruments les plus usités quand on se pique de faire de la pop. Sauf que le garçon, qui chante d’une voix un peu chargée, au léger trémolo, puise manifestement une partie de son inspiration dans la musique de film. Celle d’un John Williams (auteur d’ailleurs d’un concerto pour cor), celle aussi d’un Ennio Morricone à en juger par les cloches qui battent sur « The other side ».
Seulement voilà… Au-delà du buzz dont bénéficie aussi Woodkid (n’a-t-il pas tourné des vidéos pour Lana Del Rey, celle du « Take care » de Drake ?), au-delà de l’originalité de sa démarche artistique et de cette mélancolie dont il imprègne sans avoir l’air d’y toucher ses chansons, on peut aussi éprouver le sentiment de ne pas trop avancer. D’entendre régulièrement la même chose. Ces chansons, justement, sont souvent du même tonneau : intro au piano, entrée de la voix, suivie par les cuivres, et puis ce passage des percussions, tantôt tambours entre Bronx et Kodo, tantôt caisse claire comme sur un champ de bataille…
Alors oui, « Iron » est un morceau qui touche (le drapeau marqué des deux clés que l’on voit flotter au début du clip sert d’unique élément de décor, ce soir). Oui aussi, à partir de là le Cirque semble enfin faire fi de sa timidité. Mais c’est quand même dommage qu’il faille attendre « Run boy run » ou les rappels, et « The shore » plus précisément, pour écouter des titres moins linéaires, qui se font la malle d’un canevas rigide. A propos de ce rappel, d’ailleurs : la touche jazzy, elle vous va bien aussi, Monsieur Woodkid !
Quand il reviendra nous visiter, un peu de femmes nues, quelques éléphants, des lasers et des projections pour étoffer cet éclairage morne ne seraient effectivement pas de trop. Un peu de rouge dans le blanc, une griffe dans la mise en place ! Ou, plus sérieusement, un tout petit peu de lâcher prise, quoi.
Didier Stiers
(Photo : Sylvain Piraux)
Babahia
19 mai 2012 à 1 h 02 min
Mais vous n’avez rien compris Mr Stiers. Woodkid est tout en retenue, il suffit de l’avoir vu éclore à Gotham pour s’en rendre compte. Point besoin d’éléphants, de femmes nues et de tout le toutim pour donner de l’épaisseur à sa prose musicale. Laissez donc cela à The Voice & Co. Tout comme The Rapture, il y a une semaine, c’est une aubaine pour les amoureux du son, du fond. Plus que de la forme.
Sans rancune,
Pierre
didierstiers
19 mai 2012 à 1 h 44 min
Ah mais je ne vous jette pas la pierre, Pierre (je sais, c’est pas terrible…) ! Ce que je dis simplement, pour rebondir sur votre commentaire, c’est que trop de retenue tue la retenue, justement, efface en quelque sorte le(s) sentiment(s) qu’elle crée. Et j’entends bien qu’il ne doit pas monter sur scène avec les dames à plumes de l’Alcazar ou la ménagerie de Plankendael; là, je faisais juste allusion à sa plaisanterie de fin de concert (vous y étiez, bien sûr) pour résumer mon propos : quand Woodkid se lâchera un peu plus, ça risque d’être exceptionnel. Enfin quant au son, je pense en avoir assez souligné tout l’intérêt que j’y ai trouvé.
Amicalement,
DS
Depireux
19 mai 2012 à 8 h 49 min
Voici la nouvelle mode: poser une question sans plus inverser sujet et verbe. Tu dis quoi au lieu de que dis-tu? Tu vis de quoi au lieu de de quoi vis-tu? etc.
Une insulte de plus à la langue!
De quel bois se chauffe-t-il? Voilà ce qui serait correct.
didierstiers
21 mai 2012 à 1 h 52 min
Cher Depireux (entretiendriez-vous un lien de parenté avec l’excellent milieu de terrain du défunt RWDM?)… sachez bien que je déplore moi-même la légèreté avec laquelle il m’arrive de traiter la langue française. Et, par conséquent (voire ricochet), l’exemple que je risque de donner à notre belle jeunesse. Je sais… En même temps, j’aimerais avancer quelques circonstances atténuantes: je viens par exemple d’achever la lecture d’un ouvrage (que je vous recommande par ailleurs), ouvrage intitulé “Moi Yoda, chevalier Jedi”. Puis-je vous souhaiter une excellente semaine ?
DS
Bruno
23 mai 2012 à 13 h 36 min
Je suis en total désaccord avec vous. On a pas besoin de taper forcément dans le grandiose et une mise en scène folle pour séduire. Woodkid est un concept très original à une époque ou les musiques se ressemblent toutes. Le concept est sombre et épuré mais en rien limité. Lemoine est un gars encore timide et pas habitué à faire de la scène donc attendons un peu avant de juger sa performance et sa retenue. Avec les chansons qu’il fait, il est en effet dur de pouvoir se trémousser et sauter comme un cabri aux quatre coins de la scène. Étant disc jockey et très ouvert musicalement, je peux vous dire que je suis totalement emballé par sa musique complètement épique et ses balades.
Encourageons l’originalité au lieu de la dénigrer au détriment de daubes commerciales !