The Libertines, une histoire de rêves brisés

Pour les 10 ans du Brussels Film Festival, Flagey revivait les dernières heures des Libertines en compagnie de Carl Barât. Le documentaire « There are no innocent bystanders » de Roger Sargent y était projeté avant un DJ set du dandy londonien accompagné pour l’occasion par Didz Hammond, bassiste des Dirty Pretty Things.

Fin des années 90, Roger Sargent habite au rez-de-chaussée de l’immeuble où Peter Doherty et Carl Barât partagent un appartement avec deux prostituées. Le photographe se prend d’amitié pour les deux comparses et les suivra tout au long de la route vers Arcadie. Les « secrets gigs », l’Albion Room , les premiers pas chez Rough Trade, l’ascension du groupe jusqu’à son explosion douloureuse en 2004. Roger a tout suivi. Lorsque le groupe décide de se reformer pour quatre concerts exceptionnels en 2010, le photographe saisit l’occasion de passer derrière la caméra. Avec « The Libertines : There are no innocent bystanders », Roger Sargent signe son premier film. On lui pardonne donc aisément les erreurs de débutants et quelques problèmes de sons. Dans ce documentaire, pas de scandales, pas de bagarres ni même de drogues. Roger a décidé de se plonger dans la mécanique du groupe, ce qui en fait sa magie et ce qui a causé sa perte. L’histoire d’un poète et d’un acteur qui se rencontrent et décident de monter un groupe ensemble. L’histoire de deux antihéros qui se complètent et ont besoin de l’autre pour se surpasser. Une amitié passionnelle et fusionnelle qui prend des allures de couple. Un couple qui ne se comprend plus, tourmenté par l’alcool et la drogue, malmené par la célébrité. Le documentaire rend le parcours des Libertines presque tragique. The Libertines est devenu un groupe au destin brisé prématurément avant d’avoir pu accomplir ses rêves. Leurs rêves d’Arcadie qu’ils n’abandonnent pas encore totalement.

A la fin du documentaire, Doherty annonce gravement que seul Carl ne souhaite pas refaire un album avec The Libertines, laissant entendre que les trois autres membres du groupe (John Hassall à la basse et Gary Powell à la batterie) l’attendent désespérément. Mais c’est un tout autre discours que Carl Barât nous tient ce samedi soir sous le soleil de la place Flagey : « C’est quelque chose qu’il faudra faire un jour mais les circonstances d’aujourd’hui rendent une reformation bien trop compliquée. Ce n’est même pas une histoire d’agenda, c’est surtout de pouvoir être tous ensemble dans la même pièce sans s’entretuer. Entre Pete et moi, il faut attendre que ça redevienne naturel avant d’envisager un nouvel album. » Quand on lui demande s’il a encore des contacts avec son ancien comparse, une ombre de déception passe dans son regard. Il rechigne quelque peu à répondre mais finit par nous dire qu’il a revu Peter à Londres le mois passé. « Il devait venir me voir jouer à Paris mais il n’est pas venu. Parfois, certaines de ses attitudes me blessent encore », confie-t-il. Comme lors de cette scène du film où l’on voit Carl et John annoncer qu’il n’y aura pas de répétition ce jour-là car Peter dort et ne viendra pas. « C’est quelque chose de très familier », nous dit-il en souriant. « Le film est très dur pour moi parce que ça fait remonter un tas de mauvais souvenirs, de moments douloureux de ma vie. »

Si le film de Sargent offre des pistes de réponses pour l’oeil extérieur, ce n’est pas aussi simple pour le dandy : « C’est difficile d’être objectif dans ma position. Roger a fait du bon boulot même si ça ne m’a pas vraiment aidé à comprendre certaines situations. Il faudrait un deuxième film plus joyeux que celui-ci ! » Il est vrai que certains témoignages des deux leaders sont guidés par la déception, la tristesse et une certaine clairvoyance. Preuve que les deux musiciens ne renoncent pas à leur amitié particulière. « Je n’ai jamais dit que notre amitié était terminée mais ce n’est vraiment pas facile à gérer ! », clame Barât.

Pour l’heure l’ancien leader des Libertines et des Dirty Pretty Things se concentre sur son parcours solo. Après un premier album surprenant et un livre souvenir de ses années Libertines, Carl Barât tenait le rôle principal de l’opéra pop « Pop’pea ». « J’ai appris énormément à différents niveaux en interprétant Neron. Ça m’a rappelé ce que c’était de relever des défis. Surtout, c’est le premier projet que je fais sobre du début à la fin. Répéter et jouer sobre, c’était une véritable expérience pour moi. Même pour la dernière, j’étais sobre ! J’ai toujours utilisé l’alcool pour affronter la foule. Ici, j’ai décidé d’être courageux ! », nous confie-t-il.

Et l’auteur-compositeur ne s’arrêtera pas là et compte bien relever le défi difficile d’un deuxième album. « Ce sera fort différent du premier album. Ce ne sera pas non plus radical, je ne vais pas commencer à faire du dubstep mais ce sera plus dur, plus rock. Les concerts électriques me manquent un peu. J’ai envie de retrouver cette ambiance-là. J’aimerais bien le sortir à la fin de cette année et partir en tournée l’année prochaine…ou peut-être plus tôt. A l’arrivée des festivals, ça va commencer à me manquer de ne pas jouer!»

Maïlys Charlier


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