La playlist 1993 de Thierry Coljon

“Playlist” : Thierry Coljon retrace ses souvenirs de critique musical au journal “Le Soir”. Editions Luc Pire, 192 pages, 21 euros, en librairie dès le jeudi 15 novembre 2012.

5 albums

Björk, Debut. Il faut oublier la Björk d’aujourd’hui pour se souvenir de ce magique Debut où sa personnalité forte était chaude et ouverte à tout.
 
 
 
 
 
Eros Ramazzotti, Tutte Storie. Avec cet album, Eros sort d’Italie et domine le monde. Il s’agit de l’album parfait, avec des mélodies fortes comme il n’en retrouvera plus ensuite.
 
 
 
 
Alain Souchon, C’est déjà ça. Foule sentimentale est la chanson que tout chanteur rêve un jour d’écrire. Alain l’a fait, sans Laurent qui plus est. Une réussite qu’on retrouve sur tout l’album.
 
 
 
 
Pearl Jam, Vs. Il fallait confirmer la bonne impression laissée par Ten. Vs. prouve que le grunge de Seattle n’est plus qu’un bon souvenir et que le rock américain a encore des choses à dire.
 
 
 
 
Daniel Lanois, For the Beauty Of Wynona. Lanois livre peu de disques (il n’a pas le temps, il en produit trop) mais quand il s’y met, il est chaque fois touché par la grâce.
 
 

5 concerts


Vanessa Paradis. Son premier concert belge, c’était le jeudi 18 mars au Forum de Liège.

Peter Gabriel. Us Live, le 25 avril au Zénith de Paris avant le Flanders Expo du 30 avril.
MC Solaar. Premier concert belge, à la Madeleine, rue Duquesnoy à Bruxelles, le 28 avril.
Serge Reggiani. Le 7 mai au Cirque royal, un spectre, une ombre…

Madonna. Elle fait son Girlie Show à Paris-Bercy le 28 septembre et ne daigne toujours pas venir en Belgique.

Principaux articles de cette année-là

Jacques Dutronc : Chronique d’un triomphe annoncé à Forest-National
Françoise Hardy : Une discussion à l’insoutenable parfum de bilan prématuré
Cesaria Evora : La fée menant le bal du chagrin
Björk : La petite Islandaise a rempli la Luna
 
 

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Table des matières

La ballade de Françoise et Jacques

Thierry Coljon revient sur les souvenirs et anecdotes qui ont marqué ses 30 ans de journalisme musical dans «Le Soir».
Sacrés personnages ou monstres sacrés ? Jacques Dutronc et Françoise Hardy sont les deux à la fois. Jacques, jusque-là, je n’avais fait que le croiser au détour d’interviews que ce dernier, entouré de sa bande de bruyants Corses, parvenait toujours à détourner en un show épuisant et frustrant. Visiblement, on n’était pas le seul à s’en plaindre puisque, au vu des commentaires de la presse française, Jacques décide, pour son grand retour, d’inclure dans le spectacle une vraie interview avec un journaliste différent chaque soir.

L’exercice n’est pas aisé car il est facile, pour le public bien chauffé, de siffler l’inconnu montant sur scène pour poser ses quelques questions qui, a priori, n’ont rien à faire là, surtout avec un Jacques toujours très prompt à retourner le quidam comme une crêpe. Je m’en sortirai en me déguisant en Dutronc et en célébrant ses 50 ans, quitte à lui offrir un gros cigare et faire chanter Happy Birthday par les 6.000 personnes. Ce qui me valut une belle frayeur, quelques pièces de monnaie jetées par des âmes compatissantes, les félicitations du grand Jacques et la promesse de l’attachée de presse qu’elle ne m’oublierait pas pour une vraie interview dans un cadre moins stressant. Ce qui se fera dix ans plus tard… en Corse.
Quelques semaines après ce Forest-National, c’est au calme que je retrouve Françoise Hardy, une vraie bonne cliente comme on dit dans le métier. Tellement celle-ci est franche, honnête et généreuse dans ses réponses, parfois involontairement impudiques dans ses confidences. Comme de parler de l’état de santé de Jacques sans l’aval de l’intéressé. Voici ce qu’elle me disait de son fils Thomas, 20 ans : « Il veut être guitariste, c’est récent ça. Tous les jeunes de son âge veulent faire pareil et c’est inquiétant car c’est de plus en plus difficile d’émerger et qu’on ne peut gagner sa vie que si on est meilleur que les autres… »

Le plaisir du journaliste consiste aussi à découvrir un ou une artiste et d’assister, lentement mais sûrement, à son incroyable ascension. Quand je décide, en décembre 1992, d’aller au concert à l’Orangerie du Botanique d’une certaine Cesaria Evora, c’est sans trop savoir à quoi m’attendre, poussé seulement par l’écoute de quelques titres accrocheurs et une première presse française louangeuse. Pas de quoi me préparer à un véritable coup de foudre pour la pauvresse de Mindelo qui, quelques mois plus tard, m’invite chez elle, au Cap-Vert, pour partager son repas. Nature et impulsive, elle plantera là tous les invités au concert, vexée d’avoir été maltraitée dans sa jeunesse par une bonne partie d’entre eux.
C’est toujours un plaisir de découvrir un artiste dans son cadre de vie, comme Peter Gabriel dans son studio Real World de Box. Cela permet un vrai reportage qui va au-delà du jeu des questions et réponses. Voir Eros Ramazzotti à Bergame, c’est bien même si on se rend compte là qu’il ne parle pas vraiment anglais (à l’époque du moins) et que c’est son frère manager qui se charge finalement du boulot. Par contre, Gianna Nannini, c’est en Allemagne, à Hambourg, que je la retrouve, quitte à surtout retenir le décor nocturne de cette Grosse Freiheit visitée par les Beatles 32 ans plus tôt.

L’année finira en beauté avec le concert à la Luna d’une nouvelle venue : une Björk envoûtante qu’on retrouvera deux ans plus tard dans les ruines d’un château français pour une entrevue délicieuse malgré les difficultés rencontrées avec son accent islandais à couper au couteau.
THIERRY COLJON

Bonus internet : VINCENT QUITTELIER


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