Quand Muse joue à l’Armageddon

Douze camions et quatre bus, près de deux heures de show, une salle d’une capacité de 20.000 places environ : à Anvers comme ailleurs et comme toujours, les trois de Muse ont vu les choses en grand. Mardi soir, la setlist des Anglais faisait la part belle à leur dernier album en date. Les fans, eux, en ont pris plein les yeux et les oreilles. Mais comme dirait un George célèbre : « What else ? »

En 2009, Matthew Bellamy et ses camarades débarquaient dans ce même Sportpaleis avec The resistance, à l’occasion d’un concert, ou plus exactement d’une performance éminemment visuelle. A base de hautes colonnes mobiles où chacun se juchait pour jouer ou chanter, ces colonnes faisant aussi office d’écrans de projection sur lesquels se mélangeaient vues du groupe à l’œuvre et images plus ésotériques.

Trois ans plus tard, seul l’album a changé. Entendons-nous : ce mardi, le groupe donne encore une fois dans la performance aux parfums de barnum, mais elle est toujours aussi soignée côté visu. La scène ressemble aujourd’hui à une arène, délimitée sur son pourtour par des écrans. La batterie est montée au centre sur une structure tournante, ce qui permet cette année aussi l’ouverture des balcons en fond de salle à une partie du public. Au-dessus de tout ce dispositif est accrochée une autre structure mobile, en forme de pyramide inversée, servant elle aussi d’écran de projection. S’y dessinent graphiques, structures et cristaux, y défilent les données du Nasdaq et autre cotations boursières, ou les mots clés de « Madness » dans un lettrage et des couleurs qui rappellent la pochette de l’album The 2nd law, justement.


Dans ce vaste espace scénique, les quatre cavaliers de l’apocalypse (en comptant Morgan l’indispensable multi-instrumentiste) pourraient sembler un peu perdus, mais les torrents d’images comblent les vides. Et chacun assure sa part de show. Sur « Follow me », Matthew vient ainsi tomber à genoux devant la forêt de bras qui marquent le rythme. Sur « Undisclosed desire », c’est Dominic qui rejoint un kit électronique. Quant à Christopher Wolstenholme, il troque un instant sa basse pour un harmonica duquel il tire ce thème mythique d’Il était une fois dans l’Ouest signé Ennio Morricone (lequel sera, entre parenthèses, dans ce Sportpalais le 22 décembre), petit clin d’œil pour lancer l’épique « Knights of Cydonia ».

Et la musique, là-dedans ? Autant mégalo-lyrico-queenesque que d’habitude. Le son est énorme, les riffs de guitare et les envolées vocales baroques à l’extrême, la salle tremble et je fighte pour survivre. Les extraits du nouvel album sont en nombre et apportent à l’ensemble une tonalité plus synthétique, mais ce sont les « classiques » qui restent les plus bruyamment accueillis (« Plug in baby », « Stockholm syndrome », « Supermassive black hole »…). Même le petit break au piano à queue (« Explorers » et « Sunburn ») fait grimper le taux de décibels.


Carburant pour l’essentiel aux canons de la pop (même sous les couches de sons, les compos restent le plus souvent accessibles, et les refrains sont immédiatement mémorisables), la grosse machine Muse poursuit sa course en avant. Au fond, elle nous renvoie elle aussi au monde dans lequel nous vivons : outrancier, absurde et vide de sens à certains égards. Elle est l’écho (ou le simple vecteur ?) d’excès divers et variés. Il ne devrait pas en aller autrement le 18 juin à la Boutique Werchter, prochain rendez-vous live de Muse en terre belge.

Didier Stiers


Setlist
– The 2nd law : Unsustainable
– Supremacy
– Bliss
– Panic station
– Map of the problematique
– Supermassive black hole
– Animals
– Intro : L’Homme à l’harmonica
– Knights of Cydonia
– Monty jam
– Explorers
– Sunburn
– Time is running out
– Liquid state
– Madness
– Follow me
– Undisclosed desire
– Plug in baby
– Stockholm syndrome
– Outro : Freedom

Rappels
– The 2nd law : Isolated system
– Uprising
– Starlight
– Survival

Didier Stiers

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16 Comments

  1. Lanfeust82

    19 décembre 2012 à 14 h 28 min

    WHat else? En effet, ok pour la baffe visuelle et sonore (et encore, le Sportpaleis, c’est juste horrible pour le son).
    Tout parait parfait, même trop! tout est huilé à l’extrême, elle est où la spontanéité? le contact avec le public fut absent ou presque (“dank je wel” nombreux mais bon…) et Matt m’a paru fort suffisant et peu charismatique, un peu blasé quoi… OBJECTIVEMENT, c’est ce que je retiens de ce concert…

  2. John

    19 décembre 2012 à 14 h 36 min

    (en comptant Andy Burrows dans le rôle de l’indispensable multi-instrumentiste)

    C’est pas Andy Burrows le “4e” membre mais Morgan Nicholls

  3. ds

    19 décembre 2012 à 14 h 37 min

    C’est vrai que côté contact… ça manque un brin de chaleur. Même si Matthew est parti serrer quelques mains dans les premiers rangs pendant “Undisclosed desire”…

  4. ericlecuriste

    19 décembre 2012 à 14 h 57 min

    Tout à fait d’accord avec Lanfeust82, j’avais peur qu’il soit suffisant, et il l’a bel et bien été.. Rien a dire au niveau professionnalisme, mais par contre : bcp de manières et d’airs empruntés, et émotion zéro ..

  5. marcvds

    19 décembre 2012 à 16 h 40 min

    Il est donc loin le temps de Muse à l’Orangerie!!!

    Je ne les ai pas suivi depuis ce premier concert à Bruxelles, car à l’époque c’était une copie conforme de Radiohead. Et je n’arrive pas à accrocher.

  6. Lagoon

    19 décembre 2012 à 17 h 24 min

    Pour ma part (et je parle également au nom des amis présent hier soir) e concert était GENIAL ! Bien entendu très professionnel et très bien huilé je suis d’accord. En ce qui concerne l’émotion, j’étais un peu loin de voir si sur scène il y en avait mais ils arrivent à nous en procurer, les larmes aux yeux, les frissons et la boule au ventre. Alors oui il n’y a pas vraiment de contact avec la public, so what ? ce n’est pas le premier ni le dernier groupe à ne pas faire de grand discours. Rien n’a vraiment changé, je les suis depuis 2004 et Matt n’a jamais communiqué avec le public.
    Je n’ai q’une chose à dire … ENCORE !!!!!!!

  7. ds

    19 décembre 2012 à 17 h 29 min

    @ John : Bien entendu. Et c’est Andy Burrows qui “ouvrait” cette soirée…

  8. Jean-Fred

    19 décembre 2012 à 22 h 20 min

    Concert excellent! Fan depuis le début, c’est la première fois que j’avais l’occasion de les voir en live. Pas déçu, si ce n’est par ce manque d’impro et l’aspect papier à musique du concert. A part ça, j’ai rarement entendu un son aussi bon (désolé Lanfeust82).
    Voix impressionnante, guitare au sommet, que demande le peuple? Merci Muse!

  9. Micva

    20 décembre 2012 à 0 h 58 min

    Bon, il faudrait quand même arrêter avec vos plaintes sur l’émotion, l’aspect asocial de Matt et le fait qu’ils se la pèteraient…

    1)Vu ce qu’ils réalisent (ils ne sont pas nombreux les groupes qui remplissent deux fois Wembley et deux fois le stade de France sur une tournée), je pense qu’ils pourraient logiquement se la péter! Je trouve que ce n’est pas le cas. Matt a toujours cet air détaché, je m’en-fous-tiste. Cela me rappelle leur première apparition à Nulle Part Ailleurs…je ne vois pas tellement de différence avec maintenant.

    2) Matt a toujours été un taiseux…je suis tombé sur un article qui parlait de la présentation de l’album à l’Olympia il y a quelques semaines. Plus intimiste que cet endroit, c’est difficile et bien, le journaliste disait également (ho surprise) que Matt était taiseux…déjà avec Chris qui refuse toute interview, il reste seulement le batteur qui semble plus enclin à parler. Et alors, “what else” comme dirait le journaliste.
    Moi je ne leur demande pas de me raconter leur vie, de savoir combien ils ont travaillé pour écrire leurs chansons, qu’est-ce qu’ils ont mangé à midi.
    Non, moi j’y vais pour y entendre leurs tubes, découvrir les nouveautés. Et Basta! Ils ont donné une très bonne performance hier soir et c’est ce que je retiendrai. Et j’attends avec impatience Werchter! 🙂
    ps:j’ai eu des frissons sur la première partie de la chorale “De Betties”, franchement une réussite d’avoir eu ces personnes et un sportpaleis très attentif. Et avec deux membres du groupe qui sont venus les présenter, c’était aussi assez sympa je trouve.

  10. scorbut

    20 décembre 2012 à 10 h 24 min

    Muse a complètement répondu à l’attente: pro, lasé, gros son, gros effets visuels, esbrouffe, grandiloquence inutile. Les mcx sont bons, pas tous. Notamment les mcx lents sont mauvais et soporiphiques. Muse confirme ce que je pense d’eux depuis tjs: ils peuvent remercier Radiohead d’avoir choisi un autre chemin (et quel autre chemin!) en 2000 et ont ainsi pû exploiter une brêche délaissée par Thom et cie. Ils l’exploitent à fond et ils ont écrits 3 ou 4 très grands mcx: Starlight, Uprising, Time is running out et Hysteria. Ah oui: quelle honte de n’avoir pas joué Hysteria: là, je pige pas, un manque pour ce concert.

  11. Lanfeust82

    20 décembre 2012 à 11 h 56 min

    Tout à fait d’accord avec toi Jean Fred, le son produit par Muse était très bon (rien à redire sur la voix de Matt, on dirait presque le cd dans le salon), mais le rendu par la salle était assez périlleux selon moi… on sent la différence avec l’AB (ok petite salle) mais aussi avec des salles de nos voisins allemands.
    Pour Micva, le mot plainte est un grand mot… mais il est vrai que le côté spontané et charismatique est important selon moi (peut être pas pour vous, ce que je comprendrai, chacun ses gouts)… Le succès n’intervient pas là dedans, Depeche Mode = bete de scène malgré leur gros succès par exemple (idem U2,…). Mais je préfère des concerts où les artistes savent un peu ou ils sont et le reconnaissent (Elbow, Flo+Machine, lady Gaga (pour cette dernière, c mon épouse qui le dit lol;))

  12. Jean-Fred

    20 décembre 2012 à 13 h 31 min

    Et oui Lanfeust82, son AB = top, son Gloria Cologne = top, son 013 Tilburg = top, mais bravo au Sportpaleis et aux ingés sons pour un son pareil dans une salle de cette taille! 🙂

  13. robert

    20 décembre 2012 à 14 h 54 min

    “je fighte pour survivre”?? et tu write pour gagner ta vie? my god!!

  14. ds

    20 décembre 2012 à 15 h 57 min

    Merci Robert. Et sinon, à propos de Muse, un truc à nous dire ?

  15. Froggy

    24 février 2013 à 15 h 13 min

    Pour le “Je fighte pour survivre”, je pense que c’est un jeu de mot par rapport aux paroles de la chanson Knight of Cydonia : “You and I must fight for Our right, you and I must fight to survive..”

    Pour ma part, j’aime beaucoup Muse et j’ai adoré ce concert. Matthew Bellamy ne communiqué pas beaucoup avec le public, c’est vrai, mais il parle beaucoup plus lors de ses concert en Angleterre, pour la bonne et simple raison que le public le comprends certainement mieux. En tout cas moi je n’ai pas eu besoin de ça pour trouver qu’il faisait passer de l’émotion, on sentait qu’il mettait toute son âme dans ses chansons et j’aime ça. Bravo Muse, c’était vraiment super. Hâte de les voir au Stade de France.

    Bravo aussi a la chorale, c’était mangnifique.

  16. KevinN

    30 octobre 2013 à 23 h 17 min

    Normalement on paie environ 60 euros pour voir un concert de Muse au Palais d’Anvers et pour ce prix-là, je trouve que le groupe a fait un super bon boulot de nous donner le moment de notre vie (les effets de lumières et de son, la voix magnifique de Matthew, les solos de batterie de Dominic et sans oublier les sons rythmiques du bassiste Christopher).

    Peut-être que Matthew se laisse aller dans son flow des fois, mais le public est heureux quand il joue et ça c’est je crois l’objectif d’un concert. Il y a des groupes qui ne font absolument rien, qui crient ou qui font les débiles sur le podium, pendant que Matthew s’arrache les cordes vocales pour nous faire sourire.

    Je dis BRAVO Muse, et j’espère qu’ils donneront encore plein de spectacles hallucinants.

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