Hollywoodkid

woodkidWoodkid, l’artiste au centre des discussions depuis deux mois, présentait enfin son album « The Golden Age » en grande pompe, au Cirque Royal, avec orchestre et tout ce qu’il faut. Alors, génie post-moderne ou imposteur sans talent?

Woodkid, dès le départ, c’est une histoire de malentendus. On parle d’un Français immigré à Brooklyn, vidéaste, notamment pour Lana del Rey, homme touche-à-tout, prototype du hipster selon les codes en vigueur de nos jours. Dès le premier single, et encore plus avec l’album « The Golden Age », Yoann Lemoine a ainsi bénéficié (?) d’une über hype qui le survendait comme un petit génie « too cool for school », comme on dit dans le Wisconsin… Puis ce fut le temps de la contre-hype violente et réactionnaire.

Les temps de guerre étant passés, on allait profiter de ce passage aux Nuits Bota pour enfin se concentrer sur la musique, et dans des conditions optimales encore bien! Cirque Royal bondé, orchestre philharmonique de Mons, deux batteries, deux machines à sons, et un écran vidéo qui diffuse des films en noir et blanc hyper léchés, la marque de fabrique du kid, influencés par tous les blockbusters hollywoodiens sortis ces trente dernières années, de « 2001 » au « Seigneur des Anneaux »… Tout était en place pour se faire un avis prononcé.

20h15, le rideau tombe, les écrans prennent vie… Et il faut bien dire que l’intro est impressionnante. Le son est ample, les percus omniprésentes élèvent l’ensemble à cordes vers les hauteurs. Sur l’écran, les images défilent, esthétiques, qui nous entraînent dans un monde à part. L’idée de Woodkid, ambitieuse, louable, intrigante, c’est donc de proposer un équivalent pop aux blockbusters hollywoodiens, la BO d’un film imaginaire, en mode péplum. Un mélange des genres et des formes artistiques bien senti, qui colle parfaitement à notre époque. Et après ces premières mesures, force est de constater que le bonhomme a pas mal réussi son coup. On se croirait dans un théâtre pour visionner un film avec l’orchestre jouant la BO live, comme au temps du muet…

Mais…

PABLO GARRIGOS (ST)

PABLO GARRIGOS (ST)

.. On se croirait vraiment dans un théâtre pour visionner un film… Alors que les titres s’enchaînent et que le kid s’émerveille de l’accueil du public, on commence à pointer les failles de le performance, voire du projet, qui font qu’on ne décolle pas comme on devrait. Parce que des envolées péplum, il y en a, à foison! Et pourtant…

D’abord, on a plus affaire à des thèmes musicaux qu’à des chansons. Si bien qu’on peut être touché par des parties musicales et retomber d’un coup dans la seconde qui suit. Des thèmes qui se suivent, et se ressemblent, qui manquent un peu de distinction. Surtout, la voix ne suit pas. Elle reste étouffée, toujours sur le même ton, toujours un peu à la traîne et elle ne porte jamais (jamais!) l’ensemble. C’est pourtant ce qu’elle devrait accomplir, selon le versant pop du concept… Mais non, au contraire, à chaque envolée de cordes et de percus, le chant est toujours un peu derrière, perdu dans l’orchestration, et fait directement redescendre la tension. En clair, Yoann Lemoine n’a pas les moyens de ses ambitions. Conséquence de tout ça, l’émotion est en rade. Le concert reste divertissant, ça oui! Voire peut impressionner. Certes! Mais à moins d’avoir pleuré à la fin de « Pearl Harbor », d’émotion, il n’y en eu point. Ou si peu.

Ce qu’on retiendra, en fait, ce sont le début et la fin du set (avec notamment un ‘Iron’ décomplexé où Lemoine paraît vraiment libéré). Comme dans un film, en somme. Woodkid n’est ni le génie qu’on a voulu nous survendre, ni un imposteur prétentieux arrivé là où il est par hasard. C’est un artiste avec une vision, mais une vision qui appartient plus au monde du cinéma, de l’audiovisuel, que celui de la pop. On lui prédit une carrière hollywoodienne.

DIDIER ZACHARIE

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4 Comments

  1. Lau P

    6 mai 2013 à 12 h 11 min

    Excellente critique, c’est exactement l’impression que j’avais hier en sortant du Cirque Royal. Bravo!

  2. badino

    6 mai 2013 à 13 h 21 min

    Bonne critique…oui….mais un peu dure quand même. Il n’y a pas eu que le début et la fin.
    Sa voix est celle qu’on connait. Le “problème” vient à mon avis de l’ingé son qui n’a pas toujours bien géré la balance chant/orchestre qui parfois penchait trop du coté orchestre.
    Point de vue émotion, j’en ai eu largement ma dose et il y a belle lurette que je n’ai plus vu un public ovationner son artiste à ce point. Chapeau bas.
    On avait un peu l’impression qu’il ne réalisait pas ce qui lui arrivait.
    Pas (encore) habitué à ça….le gaillard.

  3. VincentD

    6 mai 2013 à 17 h 16 min

    Je suis tout à fait d’accord avec cette critique. Au début, on se dit que l’on va vivre un concert exceptionnel. Mais au fur et à mesure, le gâteau retombe. Autre reproche : pourquoi avoir attendu plus de la moitié du concert pour signaler la présence importante du Mons Orchestra sans trop les remercier pour leur travail. Parfois j’ai eu l’impression d’avoir devant moi un enfant gâté un peu trop narcissique.
    Mais je suis quand même heureux d’y avoir assisté pour les 3 ou 4 premiers morceaux qui m’ont beaucoup touché. Et aussi pour avoir un peu moins eu l’impression de redites que lors de l’écoute du CD.

  4. Dorothé

    6 mai 2013 à 21 h 07 min

    Dommage que les vidéos postées ne soient pas celles du concert d’hier, nous aurions pu nous faire un aperçu!

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