MLCD : pas de fumée sans feu

Après le conte tragique d’un génie, MLCD propose un voyage dans la galaxie avec un quatrième album fascinant.

Quatre ans, jour pour jour, après leur résidence de répétition de leur nouveau spectacle, MLCD s’est retrouvé au même endroit, au Botanique pour un nouveau feuilleton de la saga My Little Cheap Dictaphone.

Au printemps 2010, la bande à Michael « Redboy » Larivière publiait le magistral The Tragic Tale Of A Genius, considéré unanimement, chez nous (où les Octaves du meilleur album et de l’artiste de l’année leur ont été décernées), comme en France ou en Angleterre (album de la semaine du Sunday Times), comme étant l’album de rock belge de l’année.

Ce « disque concept » racontait, entre opéra pop moderne et ambiances à la Vertigo de Hitchcock, le parcours d’un esprit perturbé comme celui de Brian Wilson. Cordes et mise en scène très visuelle ont porté ce disque au-delà de nos frontières. Le titre « What Are You Waiting For » s’est même retrouvé sur le jeu de PS2, Little Big Planet 2.

Après une centaine de dates en Europe et au Canada, étalées sur plus de deux ans, MLCD s’est remis au travail.

« Si on devait faire le bilan de tout cela, nous a raconté Michael entouré du groupe au complet, je dirais qu’on ne s’attendait pas à ce que ça dure si longtemps. Autant de dates dans autant de pays. Les Octaves de la musique, même si elles ne sont pas très médiatisées chez nous, ont tout de même eu un impact à l’étranger. On a eu une très bonne presse un peu partout. »

Les temps étant ce qu’ils sont, MLCD n’a pas vendu plus de 10.000 albums. La scène, pour ce groupe qui se produit financièrement lui-même, est dès lors essentielle. Et que son éditeur Strictly Confidential ait réussi à placer une de leurs chansons dans un des jeux vidéo les plus populaires de l’année, ne les a pas enrichis non plus, dans la mesure où il s’agissait ici d’un forfait.

Quand le groupe s’est remis au travail il y a deux ans, le Théâtre de Liège lui a proposé de composer la musique de la pièce Roméo et Juliette d’Yves Beaunesne. Ce que MLCD a fait parallèlement à son propre album : « Ce projet a aussi financé notre disque. Mais comme il fallait des références classiques que nous ne possédons pas, on a fait appel à Manu (Delcourt) qui a une formation de musicologue à la Sorbonne. Il est resté pour notre album et il vit maintenant à Liège vu qu’il fait dorénavant partie du groupe et fera toute la tournée. »

On est donc allé écouter ça au Bota, la semaine dernière, pour cette résidence qui devait se terminer avant le premier concert de la nouvelle tournée, samedi dernier à Namur. MLCD a fait appel au scénographe Nicolas Olivier, l’auteur du Kiss & Cry de Jaco Van Dormael, et du vidéaste Hervé Jungblut, pour créer un univers qui rappelle l’esprit du nouvel album, The Smoke Behind The Sound. La fumée derrière le son ! Le feu n’est pas loin… Le groupe joue rien que pour nous le titre « Fire » qui ouvre l’album et qui, dès aujourd’hui sur le site du groupe, est accompagné d’une superbe vidéo réalisée à Londres avec la comédienne Pauline Etienne. Nicolas Guiot (César et Magritte du meilleur court-métrage 2013) a davantage réalisé un film qu’un clip. C’est l’histoire d’une fille en pleurs qui marche dans les rues de Londres, avec une bombe sur elle, et qui se dirige vers le Winter Wonderland de Hyde Park : « Ce morceau, “ Fire”, c’est comme si le diable te susurrait à l’oreille, quelqu’un qui te pousse à faire quelque chose de grave… »

Mais, étonnamment, ce n’est pas ce titre qui est le premier single extrait de l’album.

« On a choisi ce morceau car il se prêtait mieux à ce visuel. On se laisse guider par le plaisir. Aujourd’hui, tu réalises une vidéo plus pour le Net que pour la télévision qui de toute façon ne diffuse plus les clips. »

Le premier single choisi est « Bitter Taste of Live » : « C’est un choix collectif. On a tenu compte de l’avis de notre producteur flamand Luuk Cox, connu pour avoir créé Shameboy et travaillé pour Girls in Hawaii et Stromae. Ce n’est pas pour cela qu’on l’a choisi – bien au contraire – mais dès la première rencontre, on a senti que ça collait. Selon lui, c’est ce titre-là qui risque de plaire aux radios flamandes qui s’obstinent jusqu’ici à ne pas nous diffuser, alors que le Morgen nous a toujours défendus. Luuk est un puits de science, c’est un ancien batteur de jazz et d’Arsenal. On a passé six mois en studio et il ne nous a rien laissé passer. Quitte à nous engueuler au début. On a enregistré à l’ICP et au studio 5 à Liège, avant de mixer à Abbey Road. »

MLCD sait qu’il est attendu au tournant, après le succès de The Magic Tale… Durant deux ans, ils ont peaufiné un album qui ne cherche pas à lui ressembler : « On voulait prendre le contre-pieds, avec un nouveau défi, même si le visuel reste important. On voulait faire quelque chose de différent sans savoir quoi. On a démarché auprès de différents producteurs. Il nous fallait quelqu’un de dirigiste et qui pouvait s’investir totalement dans le projet. On a composé ensemble pour la première fois. D’abord dans une ferme dans les Ardennes, puis un chalet dans les Fagnes et enfin dans un mas de Provence. Il fallait retrouver cette magie qui nous unit. »

Le groupe est différent – un nouveau batteur arrivé en cours de tournée et donc un nouveau claviériste – et les cordes (sinon synthétiques) disparaissent au profit d’une partition où les claviers prennent plus de place. Il n’y a plus, derrière The Smoke Behind The Sound, l’idée d’un « concept album », avec une histoire liant chaque chanson, mais bien un thème commun qui serait la voie lactée : « C’est un univers un peu rêveur. Pour la pochette, comme pour les trois écrans sur scène, l’idée serait d’être couché dans l’herbe la nuit et de regarder le ciel. Avec une ambiance un peu enchanteresse comme ça. On a aussi exploré de nouvelles sonorités, avec des synthés analogiques, en mélangeant ce côté vintage avec des bidouillages obtenus avec un iPad. »

MLCD, désireux d’enfin percer en Flandre, s’est attaché les services de Live Nation dans l’espoir de bien y tourner et de figurer à quelques festivals importants. Pour cela, Redboy a soigné ses textes et son accent (avec l’Écossais Theo Clark). Si, à l’été 2012, Anthony Sinatra et lui ont tenu à fêter sur scène les dix ans de Hollywood Porn Stars, rien n’est pour le moment prévu de ce côté-là, Piano Club et MLCD remplissant amplement l’emploi du temps des deux leaders.

Après les dates de présentation du disque de cet hiver, on peut s’attendre à retrouver MLCD aux Nuits Botanique et à l’affiche de nombreux festivals cet été.

THIERRY COLJON

MLCD sera le 29/1 au Botanique et le 7/2 au Théâtre de Liège. Infos : www.mylittlecheap.net.


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