Elbow, ou la softitude de stade

Samedi, la tournée du groupe britannique faisait escale sur le plateau du Heysel. Les amateurs de pop en club ont dû avoir les boules, au contraire de ceux aimant les communions dans les grands espaces. Encore que, il ne fut pas exactement question de « communion »…

Qu’il se produise en salle, dans un festival ou entre les murs d’un hangar comme le Palais 12, Guy Garvey dégage toujours le même genre de sympathie bonhomme. Le mec qui monte sur scène le verre à la main et porte un toast à la santé du public. Ni rockstar, ni hipster, normal, ou presque. « I’m from another century », chante ce Mancunien dans « Charge », extrait du dernier album en date. « Cheers, mate », aurait-on presque envie de lui répondre !

Classe mais pas extravagant, The take off and landing of everything. L’extravagance n’est pas plus de mise côté light show. Il y a du velouté dans les éclairages, du coup fort bien assortis à cette profusion de mid-tempo qui constitue la setlist de ce samedi soir. Et de se souvenir qu’avant de s’appeler Elbow, à la fin des années 90, le groupe s’était baptisé Mr. Soft. Softitude, donc… Tout juste un peu secouée ici et là. Quand les cuivres se lâchent sur « Fly boy blue », un brin façon générique d’ouverture d’un James Bond. Ou quand la guitare s’énerve un rien sur « The birds », très petergabrielien pour le coup. Ou encore, juste après, pour le classique « Grounds for divorce ».

 © Sylvain Piraux

© Sylvain Piraux

« Hey, c’est chouette de voir vos jolis visages une fois de plus », s’exclamait Garvey plus tôt dans la soirée, juste avant « The bones of you ». A vrai dire, on ne sait pas trop jusqu’où il les distingue, ces visages. Le Palais 12 n’est pas le genre d’endroit propice à l’intimité et aux confidences. D’accord, le son y est raisonnablement bon – en même temps, le volume n’incite pas à se serrer pour danser des slows -, mais on est plus en configuration festival que petite salle. C’est qu’en ces temps où les disques se vendent peu, c’est le concert qui fait office de gagne-pain, alors autant ne pas se priver de rassembler du monde. Ici : peu de kids, plutôt un maximum de trentenaires et de quadras, des couples bcbg, du t-shirt « Nine Inch Nails » (oui !) comme du « Kurt Vile ». Et le sempiternel bouffeur de frites qui vient parfumer ton espace vital aux senteurs de graillon, juste au moment où tu te dis que les harmonies vocales font aussi partie de la marque de fabrique d’Elbow.

Le hic, c’est que ces mêmes harmonies se dissolvent vite, dans un grand espace comme celui-ci, sous les tuyauteries suspendues au plafond. Alors la chaleur… voire même la sympathie bonhomme, au-delà du parterre, tout ça devient vaguement illusoire. Et il ne faut plus compter que sur quelques « trucs » de bateleur pour animer la foule jusqu’au dernier rang, là-bas tout en haut dans le noir. Comme la désormais immanquable « reverse mexican wave », soit une « ola » partant des premiers rangs et puis retour. Ou le refrain qu’on peut reprendre ad libitum, comme celui de « One day like this » chanté au bout des rappels. L’un des « hymnes » du groupe (au même titre que « Grace under pressure », absent de la setlist). Un groupe auquel – conclusion – le jeu en « stade » n’apporte rien de plus.

Didier Stiers
(Photos : Sylvain Piraux)

Setlist : This blue world (instrumental) – Charge – The bones of you – Fly boy blue – Real life (angel) – The night will always win – New York morning – The loneliness of a tower crane driver – Great expectations – Scattered black ans whites – Mirrorball –  The birds – Grounds for divorce – My sad captains. Rappels : Starlings – Lippy kids – One day like this.

> Les photos du concert.

Didier Stiers

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