L’Ukraine, l’Argentine, Floreffe…

Une journée de festival un lendemain d’effervescence provoquée par un certain Manu Chao, c’est forcément calme. Trop calme même dans le chef de certains. A Esperanzah, vendredi, c’est par moments le farniente qui a failli prendre le dessus.

Vendredi, 17h et des poussières… Sur le haut du site de l’abbaye résonnent des chœurs féminins qu’on croit échappés du Temps des Gitans. Rien de Kusturica à l’horizon pourtant. Rien à voir non plus avec Le Mystère des Voix Bulgares… C’est le quatuor DakhaBrakha (un homme, trois femmes), créé voici dix ans au Centre d’Art Contemporain de Kiev, qui s’exprime Côté Jardin. S’il y a quelque chose de traditionnel dans ce répertoire où les voix sont essentiellement mises en avant – l’idée est aussi de préserver la culture ukrainienne -, cet univers-là, également théâtral, est riche d’influences plus surprenantes, apportées par des instruments de musique africains et indiens. De la musique tradi-moderne, comme dirait l’ami Baloji, et une découverte.

Autre découverte : les insectes ! Du moins, ceux qu’on peut ingurgiter au Comptoir des Saveurs. La carte affiche « cheeseburger de ténébrions et légumes », « panini au pesto d’insectes et mozzarella », et « brochette de criquets marinés et tomates cerises ». Allons-y pour une brochette, au moins, on voit bien les bestioles. Qui croquent légèrement sous la dent, un peu comme des crevettes qu’on n’aurait pas décortiquées. La marinade est légèrement assaisonnée et à vrai dire, c’est elle et les tomates qui semblent les plus goûteuses. A propos, tant que nous sommes à causer cuisine : les assiettes et les couverts utilisés ici sont en matière organique, donc jetés après usage avec les compostables ! Quant au nettoyage du site lui-même, il est assuré tous les jours par une centaine de bénévoles !

Frontstage - Brochette

« Propret », c’est presque le qualificatif qui me vient en tête à l’écoute de Moriarty accompagné par Christine Salem, la chanteuse maloya. Le mélange de folk des uns et de « tradition » réunionnaise de la seconde n’est pas contre nature, mais ça ne prend pas vraiment aux tripes non plus.

Est-ce que Catherine Ringer a le tango dans le sang ? Pas sûr, mais elle disait en tout cas aimer la manière dont Piazzola l’a revisité. Et c’est avec d’autres « re-visiteurs » qu’elle s’y baigne, Madame Rita Mitsouko. Le projet s’appelle Plaza Francia, a déjà accouché d’un premier album (A new tango song book) et la voit acoquinée notamment à deux Gotan Project, Christoff Müller et Eduardo Makaroff.

Sur scène, la balade argentine démarre sur un ton pour le moins paisible et se poursuit un bon moment dans cette veine plus acoustique. Pas l’idéal pour couvrir le brouhaha perceptible une fois qu’on s’éloigne des premiers rangs. A l’arrière du Jardin, ils sont nombreux, les festivaliers à rester assis. Le soleil et les allers-retours entre le haut et le bas de l’abbaye ont sollicité les organismes, le son dans un premier temps un peu bizarre a dû un peu décourager aussi… Heureusement, il y a l’expressivité de Catherine Ringer, un changement de tenue, un peu de jeu de scène et… les basses, l’électro qui vient se mêler au cocktail. Le mode redevient plus festif, le refrain de « Cadavez » fait mouche, une version d’« I’ve seen that face before » (Grace Jones) en croise une autre de « Marcia baila ». Tiens… cette chanson-là raconte l’histoire de Marcia Moretto, chorégraphe décédée du cancer. Une chorégraphe argentine…

Et donc à la fin, ce sont toujours les beats qui gagnent. Ceux que concocte Dimmi, originaux ou remixés, tendance pré-French Touch et deep house plutôt que Tomorrowland, se mélangent à du saxophone. Rien de neuf là-dessous, mais comme souvent dans les festivals, en fin de journée, c’est par ce genre de son-là que beaucoup semblent avoir envie de se laisser porter.

Didier Stiers

 

 

Didier Stiers

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