La pause Micro

Il ne faut pas être sur place depuis des heures pour s’en convaincre : dans la litanie des rassemblements musicaux de l’été, le Micro Festival est une parenthèse. Une respiration. Un retour à l’école buissonnière…

Est-ce le site et son agencement ? L’esprit du truc ? Les gens ? Est-ce dû à Liège ? Toujours est-il que quand on y vient pour la première fois de sa vie, on peut très bien éprouver l’impression d’avoir déniché l’endroit le plus convivial du monde. De la brique et de la verdure, où l’on croise le batteur des Belgians qui a tout juste terminé son service au bar. Le programmateur de Dour venu en voisin et en bénévole porter des barrières. Où les frites goûtent comme celles préparées par grand-maman. Où Bouli Lanners te raconte le tournage chez les Indiens d’une scène du prochain film des frères Malandrin, Je suis mort mais j’ai des amis. D’à-propos : c’est l’histoire d’un petit groupe de rock invité à Los Angeles… qui a fait de l’acteur un très crédible guitariste. Du moins dans les gestes et les attitudes. Même si, et tu tombes d’accord avec lui, c’est souvent le bassiste qui fascine le plus, dans un groupe. Non ?

L’affiche de cette cinquième édition, sold out, sent l’aventure et la découverte mais reste en même temps accessible. On la dirait conçue dans une idée de crescendo : de concert en concert, les pauses étant à chaque fois laissées aux bons soins de dj’s (ci-dessous : les très recommandables Black Slip), c’est de plus en plus emballant, étonnant, voire festif…

LIEGE. CONCERT AVEC DES DJ'S AU MICRO FESTIVAL.  Photo Michel Tonneau.

Après Fùgù Mango et Alpha Whale, direction le Portugal d’où arrive Paus (prononcez « paousse »). Ce quatuor compte deux batteurs, installés face à face à l’avant-scène, et s’amuse plutôt sur le versant expérimental de la musique. Pop bruitiste, math rock, BRNS et Animal Collective en plus brut, des voix moins faites pour chanter que pour accompagner les instruments : le cocktail sort de l’ordinaire, même s’il s’avère parfois un peu âpre.

Le rock garage des Américains de Night Beats tient la route et la pop de BRNS promet encore de jolies choses (l’album arrive), mais c’est avec les Australiens d’UV Race qu’on a cette fois envie d’embarquer. Échappée de la campagne de Victoria en 2007, cette bande de gamins sans trop d’allure n’a pas non plus l’air d’y toucher. Mais compte déjà trois albums à son actif, le dernier en date s’intitulant Racism. L’assise rythmique est solide et donne par moments à leur son un petit quelque chose de tribal auquel vient se mêler un clavier qui, même en sourdine, n’est est pas moins lancinant.

Punk sans être agressif, garage sans les clichés, une touche psyché, une autre de glam : UV Race file des coups de pied à la classe moyenne, dans des textes qui font un peu leçons de vie. Pour les conventions, on repassera : Marcus Rechsteiner, le chanteur clairement en surcharge pondérale carbure au Coca et finit en calcif.

LIEGE. CONCERT THE GROWLERS AU MICRO FESTIVAL.  Photo Michel Tonneau.

C’est alors qu’arrivèrent les Growlers… et que s’ouvrirent les grands espaces américains. Parcourus à bord d’une Cadillac décapotable. Le groupe, qui vient d’entamer une tournée européenne, distille sous le chapiteau du Micro des parfums sixties et des arômes californiens. « Gay thoughts » est le genre de petite cavalcade irrésistible. Et « Empty bones », entre surf et dub, un de ces morceaux qui s’arrêtent toujours trop tôt. Le concert s’achève, encore sous le soleil… et Brooks Nielsen, le chanteur, termine avec une petite fille juchée sur son dos !

Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas ! Frappés par la Loi de Murphy, la scoumoune et la mouscaille réunies, les trois Belgians sont obligés de remettre leurs habits d’Experimental Tropic Blues Band après quelques titres seulement. Côté montage vidéo, la technique rend les armes : pas de son mais des images, et puis plus d’images mais du son. Bref, c’est comme qui dirait le foutoir, que les Tropic rattrapent dans la bonne humeur et un souk très rock’n’roll, en puisant dans divers répertoires : le leur (« Do it to me »), celui d’Andre Williams (« Agile, mobile ans hostile »)… Peut-être pas le climax attendu, mais une sorte de climax quand même !

Frontstage - Belgians

Didier Stiers
(Photos : Michel Tonneau)

Didier Stiers

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