Le lonesome cow-boy Duvall, diable d’homme

« Je ne me prends plus pour Dieu » dit le septième album de Jacques. Le loner bruxellois se rend compte qu’il n’est pas immortel et donc écrit plus que jamais. Rencontre. Suite au come-back de 2009 avec Le Cowboy et la Call-girl, Jacques Duvall est devenu un Expert en désespoir (2011), un solitaire chapeauté qui nous revient avec une nouvelle bonne dose de country mitonnée à Liège, en quelques jours, par Benjamin Schoos. Un Miam Monster Miam qui peaufine une country qui, en mode francophone, avec la plume alerte et acide de mister Jack, n’en est que plus originale.

«  C’est vrai qu’on n’est pas nombreux, reconnaît Jacques croisé au centre-ville, à deux pas de chez lui. Il y a eu Hugues Aufray et un peu Bashung période Boris Bergman. Sinon, c’est en Flandre qu’on trouve le plus de fans de country. Je me souviens avoir dû aller dans un bled en Flandre pour voir Chip Taylor. Je fais partie d’une génération biberonnée à Bobbejaan Schoepen. Aujourd’hui, il y a Daan ou ceux du film The Broken Circle Breakdown. »

Sur son album, Jacques assume son allure de cow-boy, diable d’homme chevauchant une licorne, trident maléfique en main : «  J’ai toujours été client de ça. Gosse, je lisais les BD de Jerry Spring et Lucky Luke. C’est le côté cow-boy enfantin, de Johnny à Eddy Mitchell à Belleville, les cinés de quartier et la BD. Et puis ça a continué avec les westerns spaghettis de Sergio Leone et Sergio Corbucci, des films politiques finalement. J’ai flashé sur l’Italie, ça a donné Comme la Romaine et l’adaptation française de « Ti amo ». En plus adulte, c’était Corto Maltese ensuite. Je me suis ensuite intéressé à Willie Nelson, Guy Clark, Graham Parsons… Mais ça n’a pas toujours été à la mode. John Lennon se foutait de Dylan quand celui-ci a enregistré Nashville Skyline avec Johnny Cash. A l’époque, c’était perçu comme une musique de rednecks, de racistes réacs’.  »

Jacques ne se prend donc plus pour Dieu : «  Je laisse là mon orgueil/ Et mes airs dédaigneux  », chante-t-il sur un disque s’ouvrant par « Tout seul » (Tout seul/ Tout froissé/ Tout cassé/ Tout à fait dépassé). En fait, à 62 ans, Jacques se rend compte qu’il n’est pas immortel, avec « La vieille locomotive » qui vaut bien « Ma petite entreprise » de Bashung. Pour terminer en beauté par « Quand je serai incontinent » (Est-c’ que j’rest’rai/ Ton mâle dominant/Quand je s’rai incontinent).

«  À un moment, tu te rends compte que t’as dépassé ton point culminant. Tu commences à envisager une lente dégradation. Ce qui n’est pas un problème en country où t’es plus crédible si t’as l’âge de Johnny Cash plutôt que de Garth Brooks. »

Au fil du temps en tout cas, Duvall est de moins en moins un tireur solitaire. L’an dernier, on a vu son nom dans les disques d’Antoine Chance, Suarez, Benjamin Schoos et April March, en plus de la biographie Le contrebandier de la chanson, paru aux éditions du Caïd. Cette année, on attend de découvrir ses textes réalisés pour les albums d’Alain Chamfort et Marie France. Il a également participé au disque de Sabino Orsini pour des chansons inspirées de la mafia calabraise. Un disque-hommage va même bientôt paraître : «  Ah bon ? Cela fait tellement longtemps qu’on en parle que je suis heureux d’apprendre qu’il va se faire. Quand je n’étais pas bien, Benjamin a fait plein de trucs pour me remonter le moral, c’est assez touchant. J’ai encore d’autres projets, comme ce disque portugais de Lio reprenant des chansons de Dorival Caymmi, une sorte de Brassens brésilien mort en 2008. On a commencé des adaptations françaises de tubes rock, avec Antoine Chance. Je fais toujours des choses avec Chris Electro et Electronique de France. Sans parler du disque solo de Jean-Marc Lederman et du prochain Benjamin qu’on fera chez Bertrand Burgalat. Mais si tu dis oui tout le temps, t’es débordé. Comme je fonctionne à l’envie, je suis dans l’écriture en ce moment et donc pas en mode concerts. Rien n’est prévu pour le moment côté scène. »

Jacques Duvall : « Je ne me prends plus pour Dieu » (Freaksville). Album disponible au rayon vinyle, avec les trois formats (LP, CD et code digital) en un.

 


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