Les harmonies particulières d’Ozark Henry

Piet Goddaer s’offre l’ONB pour revisiter son répertoire, en studio comme sur scène. Il nous parle d’Ann Demeulemeester, de David Bowie et de son père Norbert

La dernière fois que nous avons croisé Piet Goddaer, il portait une longue tunique noire. Cette fois, c’est en tenue en noir et blanc d’Ann Demeulemeester qu’il nous reçoit : «  Je suis content de retrouver chez elle une identité proche de la mienne. Ses vêtements m’aident à souligner ma propre identité musicale. Je m’en rends surtout compte quand je suis en Asie ou même en Italie. Là-bas, on ressent fortement cette identité belge basée sur un cocktail d’influences éclectiques, romanes, anglo-saxonnes, germaniques. Ça se retrouve aussi bien dans ma musique que dans la mode belge. »

Ainsi Ozark Henry est-il de retour avec l’Orchestre national de Belgique qui, pour la première fois de son histoire, se plie à cet exercice mêlant pop et classique. Piet a produit lui-même, financièrement et musicalement, cette nouvelle lecture de son œuvre rehaussée de trois inédits et de la reprise du « Heroes » de David Bowie : «  Dans une interview en 1997, on lui a demandé quels étaient ses trois albums préférés de l’année et il a cité mon premier disque. Il m’a invité en 2002 à son concert à Ostende et là, je lui ai apporté mon troisième album. On a eu le temps de sympathiser, il a été adorable. Il m’a dit qu’il avait beaucoup aimé mon deuxième disque. Il a ensuite souvent parlé de moi et de ma musique en télévision. Il y a deux ans, sur Rai 2 en Italie, une émission me montre son témoignage et me demande, pour l’occasion, de chanter une de ses chansons. J’ai choisi «Heroes» en veillant à me démarquer de l’original. Pour l’enregistrer, il faut son autorisation bien sûr. Je sais qu’il a refusé une version réalisée par Peter Gabriel. Là, il a bien aimé et comme c’est presque un nouveau morceau, il m’a suggéré de changer le titre, vu que je raconte une autre histoire. »

Comme Hooverphonic ?

Ozark Henry avec des cordes ? C’est bien plus que ça même si, il y a peu, Hooverphonic a aussi proposé des titres « with strings » : «  Je savais qu’on ferait la comparaison. Je travaillais depuis un an sur mon projet quand Alex a sorti le sien. Même si ma démarche est différente, on a en commun tous les deux de faire de gros efforts pour arriver à un résultat. Le risque est conséquent ici. Les concerts me permettront tout juste de retoucher ce que j’ai investi. »

Pour Piet, qui à 6 ans étudiait le saxophone et le piano à l’académie de Courtrai, il s’agit de réaliser un vieux rêve. Déjà compositeur de cinq bandes originales de film, le monde classique n’a aucun secret pour le fils de Norbert Goddaer, compositeur et professeur d’harmonie musicale, contrepoint et fugue au Conservatoire royal de Gand : «  Depuis que je suis tout petit, je baigne dans ce mélange de musiques. J’ai toujours aimé Beethoven, Mahler, Dvorak, Ravel, Stravinsky, tout en écoutant avec mon frère aîné Joy Division, Santana, Stan Getz ou Dave Brubeck. C’est pour ça que tout se retrouve dans ma musique. Beaucoup de musiciens de l’ONB ont d’ailleurs été les élèves de mon père. Il a 82 ans et veut toujours être le premier à écouter un de mes nouveaux morceaux. Il sera là aux Beaux-Arts, bien sûr. Jouer sa musique ? Oui, ça me plairait… si j’avais le temps. Lui, il me dit que je dois d’abord penser à ma musique. D’avoir travaillé en 9.1 avec l’ONB m’a d’ailleurs déjà donné plein d’idées pour la suite. »

Paramount célèbre à sa façon les 20 ans d’Ozark Henry qui a réussi à imposer son style. Piet est un compositeur majeur de notre temps. Le Courtraisien, père de deux enfants de 5 et 2 ans, vit à Oostduinkerke, en bord de mer, où il a son studio et où il se ressource : «  J’adore la mer du Nord, son odeur, ses ambiances. Dès que j’ai fini mes interviews ici à Bruxelles, je rentre et dès Bruges je ressens un sentiment de paix. »

En concert avec l’ONB le 5/3 à Bozar, le 12/3 au PBA de Charleroi, le 13/3 au Casino d’Ostende et le 27/11 au Lotto Arena.


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