Dour, jeudi, début de soirée… Comme une envie d’expérience physique un peu poussée. Ça tombe bien, il y a justement A Place To Bury Strangers qui joue à la Cannibal Stage !
Le trio de Brooklyn – Oliver Ackermann (guitare, voix), Robi Gonzalez (batterie), Dion Lunadon (basse) -, c’est un peu l’équivalent d’une claque appliquée en même temps sur les deux oreilles, suivie d’un nettoyage en profondeur à la foreuse.
Cliché comme comparaison ? Je vous le concède, mais il y a réellement de ça dans la musique du groupe et dans la manière dont il la joue actuellement. Comme les trois l’expliquaient récemment à propos de Transfixiation, leur récent quatrième album : « Nous avons essayé de capturer le son d’un tympan en train de se rider. Vous avez déjà ressenti ça ? Quand vous vous placez en face d’un haut-parleur qui joue à fond, à un moment, vous avez l’impression que votre tympan se recourbe, s’enroule sur lui-même… Et ça rend confus, ça donne une sensation bizarre. Malsaine, métallique… A ce moment-là, vous priez pour vomir, vous sortir ça du corps… »
L’estomac tient le coup, sous les assauts de ce noise rock, qu’on rattache par instants à My Bloody Valentine, Sonic Youth ou The Jesus And Mary Chain. Le mur du son est rêche, énorme, à peine crevassé par de soudaines explosions d’effets. Et le bruit de la guitare hurlante ou de la basse qui finissent écrasées par terre.
A Place To Bury Strangers, c’est aussi une drôle de filiation avec Suicide. Lors du final (classique pour le trio), un final hallucinant où le chaos menace de prendre (enfin) le dessus : Dion Lunadon s’en va en slam, toujours avec son engin, rejoindre la régie son, descend à terre et passe près d’un quart d’heure à jouer un crescendo sur un beat répétitif…
Ce jeudi est décidément le jour du rock… Après My Diligence et Dario Mars en début de journée, ce sont les bons vieux Anglais d’Electric Wizard qui ont fait parler l’électricité, version doom, accompagnée par ces projections dont ils ont le secret (films de bikers, femmes nues et drogue – attention, on rappelle que la drogue ce n’est pas bien). Autre découverte du jour, toujours dans le créneau rock : les Maliens de Songhoy Blues (notre photo), soit Garba Touré, Aliou Touré, Oumar Touré et Nathanael Dembélé, totalement fascinants dans leur manière de fondre ensemble tradition et modernité.
Didier Stiers
(Photos : Mathieu Golinvaux)