A l’heure où La Muerte nous revient avec un album live – et nous en avons trois exemplaires à vous offrir -, replongeons, si vous le voulez bien, dans l’entretien que le groupe bruxellois nous avait accordé en février. Peu avant son concert à l’AB… justement restitué sur ce disque en public.
A côté de votre répertoire propre, vous jouez aussi des covers… très différentes, de Carl Douglas à Pink Floyd en passant par les Troggs. Qu’est-ce qu’elles représentent, pour vous ?
Marc : Quand j’écrivais, c’était influencé par ce que j’allais voir au cinéma, par ce que je lisais… C’est pareil pour les reprises. Notre panel musical est très large, parce qu’on n’écoute pas que du blues pur Delta, on écoute de tout. On a pris ce qui nous touchait le plus, à la limite dans tous les genres musicaux, pour bien marquer notre côté iconoclaste. Après… Par rapport à Pink Floyd par exemple (Ndlr : « Lucifer Sam »), c’était autre chose : on voulait attaquer un genre qui était le « brutal psychedelic ». Il fallait prendre un morceau qui nous convenait le mieux, et le plus symbolique… Nous sommes proches de l’art contemporain ou de l’art moderne : on se réapproprie les morceaux. Si tu écoutes, si tu connais la musique, tu vois que le morceau est complètement transformé. Il y a des bases, mais on ne réinterprète même pas, on se l’approprie et on joue carrément un autre morceau. D’où nos problèmes… Je me rappelle que l’intelligentsia sixties estimait qu’on passait ces morceaux à la tronçonneuse !
Dee-J : J’ai encore vu sur YouTube des gens qui nous insultent pour ça, actuellement, alors que c’est quand même un morceau qui date de 86. Il y a encore des gens que ça choque aujourd’hui !
Marc : En 84, quand nous avons proposé notre premier set, je n’ai pas compris qu’on doive à ce point se battre contre le milieu, la scène rock. A quoi avaient servi les Sex Pistols ? A rien ? C’était comme si tout s’était refermé en quelques années, redevenu tout d’un coup conventionnel !
En 2015, vous avez l’impression que le groupe est moins politiquement correct que la majorité de ce qu’on peut entendre aujourd’hui ? Que « ça », c’est resté ? Ou que vous avez « fait des petits » ?
Marc : Des petits, je n’en sais rien, mais si je vois ce qui s’est fait ces 20 dernières années… Prenons toute cette scène stoner : nous n’en étions quand même pas loin. Toute la scène blues punk : nous, on vient en 84 avec ces morceaux déjantés ! Je ne vais pas dire que nous avons tout inventé. C’est vrai qu’on s’inspirait de toute la scène australienne, et puis on a été picorer, dans Sabbath, dans… Je ne dis pas que nous étions des inventeurs, mais nous étions là dans les prémices, dans les débuts de tout ce que je peux voir ou écouter aujourd’hui. Bon, ce sont des groupes balèzes actuellement, je respecte, je trouve ça vachement bon, mais ce sont des scènes qui existent, et donc quelque part, nous sommes moins politiquement incorrects qu’à l’époque. Par la force des choses. Peut-être que sur scène, nous allons encore choquer… Mais nous restons quand même comme un serpent qui sinue entre les genres.
Vous vous dites quoi, quand vous jetez un œil dans le rétroviseur ? Qu’est-ce qui vous passe par la tête ?
Dee-J : Quand on me demande de décrire notre musique, je réponds que Marc et moi, on a fait un groupe d’égoïstes. On a voulu jouer ce qu’on avait envie d’entendre. Et c’est ce qu’on a fait pendant dix ans. Ça a plu à d’autres gens, tant mieux, mais pour le même prix, on le faisait dans notre jardin ou dans notre cave, et personne ne nous écoutait. Ce n’est pas ce qui s’est passé : on a fait des disques avec ça, d’autres gens ont trouvé ça très chouette, avaient aussi envie d’entendre la même chose, mais à la base, je considère qu’on a fait un truc d’égoïstes. Je me faisais virer de partout où je jouais parce que je voulais faire ça ! Quand j’arrivais dans un groupe, après trois mois, on me disait non, voilà la porte ! Et on s’est mis ensemble parce qu’on voulait faire… ce qu’on a fait. Donc on ne peut pas se plaindre qu’on ait été un peu des parias ou mal vus ! C’est la meilleure description que je puisse donner : c’est égoïste. Mais très heureux de pouvoir le partager avec d’autres gens après. Très heureux de pouvoir échanger. Et comme on le disait à l’époque : si notre violence scénique ou musicale empêchaient certains de faire des conneries pour plutôt se défouler dans la salle, c’était très bien aussi. Et si ça se trouve, c’est une échappatoire pour moi aussi, j’aurais peut-être mal tourné si je n’avais pas fait La Muerte.
Marc : Tu serais peut-être devenu un bon garagiste !
Didier Stiers
(Photos : Danny Willems/portraits, Mottow Soundz/live)
> CONCOURS
EViL, c’est le titre judicieusement choisi de ce live, paraît ce lundi 2 novembre sur le label Mottow Soundz (Moaning Cities, Romano Nervoso, My Dilligence…). A vous offrir : trois exemplaires de ce double vinyle 180gr, translucide, couleur fumée, « gatefoldé » comme il se doit (avec la version digitale incluse). Mode d’emploi de ce concours : les trois heureux ou heureuses seront tirés au sort parmi ceux et celles qui nous laisseront un commentaire ci-dessous. Heure limite de participation : ce vendredi, minuit…
Leq62
30 octobre 2015 à 15 h 32 min
Trente ans et… toutes ses dents
Tof xxx
30 octobre 2015 à 16 h 55 min
La Muerte… Moi aussi, à ce (fameux!) concert de 87 au Moderne… Que de souvenirs!!!
Jpauldb
30 octobre 2015 à 17 h 25 min
J’y étais à l’AB avec ma fille de 13 ans. Découverte pour elle, nostalgie pour moi …
Leq62
30 octobre 2015 à 19 h 22 min
30 ans et encore toutes ses dents !
Peter Lories
30 octobre 2015 à 20 h 57 min
1984, le bar de l’AB. Premier concert de La Muerte. Le grand retour de la guitare et le feedback!!!