EODM: “Nous voulons rejouer au Bataclan”

Eagles of Death Metal s’exprime pour la première fois depuis le drame parisien. Entretien vidéo.

Qu’un groupe décide de s’exprimer sur un média alternatif n’a certes rien de nouveau. En Angleterre, des artistes comme Paul McCartney ou Damon Albarn ont déjà accordé des entretiens exclusifs pour le magazine Big Issue, écrit par des journalistes mais vendu par des sans-abri. On ne trouve absolument rien à redire au fait que la clique de Jesse Hughes accorde une interview filmée à Vice, producteur d’un documentaire The Redemption of the devil (sorti en VOD cet été) qui suit le leader, ordonné diacre catholique, le temps d’une année. Par contre, la bande-annonce en ligne depuis samedi dernier est embarrassante parce qu’elle est montée comme n’importe quel autre sujet où Hughes explique, la mine grave, « qu’un gamin a survécu en se cachant sous ma veste en cuir ». Shane Smith, le PDG du groupe, « ne voit pas en quoi c’est une course aux clics. On fait savoir aux gens qu’un entretien arrive bientôt. On travaille dessus tout le week-end ». Soit.

Par ailleurs, il n’est pas inutile de rappeler que parmi les 89 victimes du Bataclan se trouvaient Nick Alexander (responsable du merchandising) ainsi que trois Français, employés chez Mercury, la maison de disques des Eagles Of Death Metal. Et que les témoignages des musiciens et de l’ingénieur du son recoupent les autres témoignages des spectateurs présents. Ceci étant, comme le raconte Julian Dorio, le batteur : « C’est difficile de couvrir les bruits d’un groupe de rock. J’ai tout de suite senti l’odeur de la poudre à canon. Ils tiraient sans relâche sur les spectateurs. » L’émotion est palpable à chaque plan. La voix chevrote. Les visages restent stupéfaits devant l’impensable. Comme ceux des Rolling Stones lors de la tragédie d’Altamont (le 6 décembre 1969) même si le contexte est différent : le groupe de Mick Jagger avait lui-même engagé les Hells Angels pour faire le service d’ordre.

Le témoignage de l’ingénieur du son apporte une autre perspective géographique au drame. Situé au fond de la salle, il a aussi craint pour sa vie : « Le mec a essayé de me tirer dessus, certains boutons de ma table ont explosé. Il m’a loupé, j’ai dit aux gens de se jeter par terre et l’autre criait Allah Akbar ! Ensuite, lorsqu’il a rechargé son flingue, nous avons pu sortir avant que les tirs ne reprennent. » Étrangement, au milieu des 26 minutes, Jesse Hughes s’exfiltre de la pièce pour retrouver Josh Homme à l’occasion d’un entretien resserré pour des propos tout aussi bouleversants. « Il m’a fallu un peu de temps pour découvrir que c’était vrai ce qui se passait à Paris. Ce n’était pas encore aux infos. Je me suis rendu à nos bureaux pour faire ce qu’il y a à faire dans ces cas-là et les ramener à la maison. »

On retiendra surtout de cet entretien que le groupe souhaite être le premier à se produire lors de la réouverture du Bataclan. Que Eagles of Death Metal a hâte de reprendre cette tournée mondiale bien qu’au jour d’aujourd’hui, les nouvelles dates ne sont pas encore annoncées. « Au fond, déclare Hughes, nous représentons les gens qui ne sont pas sortis vivants. » Eagles of Death Metal invite aussi les groupes et artistes à reprendre son classique « I love you all the time » afin de reverser ensuite les droits d’auteur aux victimes et familles.

PHILIPPE MANCHE


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