Toujours sur le fil

Groupe culte peu voire pas du tout porté sur les concessions, Wire était hier à l’Orangerie. Le temps d’un concert, disons… salutaire.

« Groupe qui ne fait pas de concessions », ça veut dire notamment que vous pouvez toujours rêver d’entendre tel ou tel morceau, « I am the fly » par exemple que je réécoutais l’autre jour sur une compile des Peel Sessions, et vous brosser parce que de toute façon, Newman & co ne le joueront pas. Culte d’accord, mais pas question pour autant de s’appesantir sur le back catalogue, aussi bien fourni qu’il soit. Pas question non plus de se plier à cette mode plus récente qui veut que telle ou telle formation historique joue en entier son album le plus emblématique. Ces Anglais ô combien influents (que serait Blur sans Wire, par exemple ?) sont d’un autre moule ! Près de 40 ans après leurs débuts, ils ne regardent toujours pas dans le rétro, préférant avancer, évoluer.

Chez Wire, on ne cause pas, même avec le public. Ou alors, très peu. Quand Graham Lewis lâche que tout ce qu’il y a à faire… c’est vivre, allusion malgré tout à l’actualité récente. Ou pour réclamer de la lumière, quand les lights flanchent… Et enfin chez Wire, on ne fait pas de show sur scène, sauf si l’on considère que Matthew Simms, le « jeune » guitariste embarqué en 2011, chevelu que c’en est un contraste avec la pilosité éparse de ses trois camarades, s’y plie un chouïa quand il triture ses pédales d’effets ou colle sa guitare à son ampli.

Frontstage - Wire - 2

La setlist, elle, a peu changé depuis le début de cette tournée. Et les extraits du dernier album en date (sorti en avril, intitulé en toute simplicité… Wire) s’y taillent en belle place. Dès l’ouverture du concert déjà, avec « Blogging », référence transparente à l’aliénation digitale dans laquelle nous avons sombré aujourd’hui. Autre insert marquant : « In Manchester », presque doux, qui est ce que Wire a dû faire de plus (proche de la) pop à ce jour.

Colin Newman, avec son sac en bandoulière, son petit chapeau, ses lunettes sur le bout du nez et sa posture un peu courbée, donne l’impression d’un brave pensionné qui occupe ses journées en faisant de l’art. Sa tablette est fixée à son pied de micro. Un prompteur ? La voix n’est pas toujours top, mais quand il empoigne l’une de ses guitares, c’est autre chose… Oh, ici et là, elles sonnent parfois moins punk qu’on les attendait, plus tronçonneuse que disqueuse si vous voyez ce que je veux dire, mais l’esprit est toujours là malgré tout. La tension aussi, qui prend aux tripes, sur « Split your ends » et le récent « Octopus » notamment.

Frontstage - Wire - 3

Et puis, ce n’est pas comme s’il ne se passait vraiment rien/rien sur scène. Graham Lewis, qui signe nombre des textes du groupe, prend à son tour le micro, deux fois même, le temps notamment d’un « Blessed state » particulièrement émouvant (dédié à Annik Honoré). Pas de concession ? Sauf à l’humour ! Enfin… un certain humour, celui qui fait par exemple que « Brazil », extrait du classique Pink flag de 77 et envoyé en guise de premier rappel, ne dure qu’une quarantaine de secondes. L’essentiel est toujours là, chez Wire.

Didier Stiers

Setlist : Blogging – Joust & Jostle – Boiling boy – Silk skin paw – Wolf boar – Mekon headman – Burning bridges – High – In Manchester – Sleepwalking – Stealth of a stork – Split your ends – Octopus – Blessed state – Swallow – Harpooned. Rappels : Brazil – Adore your islands – Used to.

 

Didier Stiers

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