Miles Kane et Alex Turner réactivent leur dream team avec un deuxième album décevant. Désormais installé à Los Angeles, le duo, à l’image de Everything you’ve come to expect, semble se la couler douce. Rencontre à l’avenant.
Et après tout, peu importe. En plus de 25 ans de métier, on a déjà forcément vécu des rencontres foireuses. Et ce, pour plusieurs raisons. Que ce soit pour un entretien préparé en dernière minute ou pour se retrouver face à un interlocuteur passablement défoncé ou fin saoul. Parfois aussi, comme dans toute relation humaine, le courant ne passe tout simplement pas. Une première question qui agace. Une réponse qui crispe et ç’en est fini. Dans d’autres cas de figure, on fait confiance à l’intelligence des deux parties pour sauver la mise, prendre sur soi et composer afin d’arriver à écrire quelque chose de relativement sensé dans la foulée.
Ce 28 janvier 2016, dans un hôtel de l’avenue Louise, lorsque l’attachée de presse nous annonce qu’Alex Turner et Miles Kane ont déjà plus d’un quart d’heure de retard alors qu’il est à peine dix heures du matin, on se dit que c’est déjà mal embarqué. Lorsqu’en regagnant la suite des jeunes gens (le chanteur des Arctic Monkeys et l’ancien leader des Rascals affichent chacun trente printemps) et qu’on croise un confrère débité, la confirmation d’une rencontre chaotique se confirme. Et pourtant, Alex Turner est plutôt d’un naturel affable et Miles Kane, rencontré à de nombreuses reprises, est lui aussi généralement généreux. Jusqu’à inviter lors de son premier concert solo à la Rotonde du Botanique, un jeune fan de 15ans dans les loges après le concert.
En saluant Alex, affalé dans le sofa de sa suite, les paupières lourdes et la voix au ralenti, on comprend tout de suite que le chanteur et guitariste s’est envoyé un énorme cigare… Quand Miles débarque cinq minutes plus tard, après le «hug» réglementaire, on se pince en se disant que ces deux-là, après cinq minutes complètement inutiles composées de «private jokes» et d’éclats de rires cannabiques–, semblent échappés d’un film de Guy Ritchie genre Arnaques, crimes et botanique ou d’un roman d’Irvin Welsh. En mode «Fuck them all», quoi.
«Je ne sais plus très bien comment tout cela a recommencé, déclare Miles Kane entre deux bâillements. On s’est retrouvés un jour à Malibu et on a composé de façon tout à fait naturelle le morceau Aviation. De fil en aiguille, on a continué en sachant que le disque allait suivre. A chaque fois qu’Alex faisait des interviews avec les Monkeys, tes collègues lui demandaient quand il allait refaire un disque des Last Shadow Puppets. Idem de mon côté. Au moins, avec ce disque, on sera peinard pour un bon bout de temps.»
Quand on leur demande ce qu’ils ont tout simplement voulu raconter à travers cet Everything you’ve come to expect (un titre qui prône l’ouverture), après quelques rires hystériques, Alex sort le petit orteil du bois. «Tout est à chaque fois possible avec Miles. Je pense qu’on a essayé des choses plus abstraites tout en souhaitant malgré tout garder le format pop. On a grandi. Dans le bon sens. Je n’en sais foutre rien, en fait.» Et d’ajouter: «Par exemple, avec Dracula teeth, j’ai voulu exprimer une espèce d’imagerie qui représente l’état amoureux et la frénésie qui l’accompagne.» «Plus généralement, reprend Miles Kane, Histoire de Melody Nelson reste notre référence ultime tant au niveau des arrangements et de la texture sonore.»
On n’en saura pas plus à l’issue d’une petite vingtaine de minutes qui nous a fait l’effet d’une bonne heure. Toute la presse présente ce jour-là est ressortie dépitée par la nonchalance et le je-m’en-foutisme affichés et assumés. Et en fin de compte, on a moins envie de défendre ce disque paresseux. Au groupe de faire la différence sur la scène de Rock Werchter, en juillet prochain…
PHILIPPE MANCHE
The Last Shadow Puppets en concert le 3 juillet 2016 à Rock Werchter. www.rockwerchter.be
Everything You’ve Come To Expect *
Six ans après un miraculeux The Age of the understatement, Miles Kane et Alex Turner réactivent leur super groupe pour un résultat en deçà de nos espérances. Si on reconnaît leur style habité fait de grandes chevauchées à la The Coral, portées par des envolées de cordes très cinématographiques, une chanson sur deux manque cruellement de corps et de relief. A la vue du curriculum vitae des deux musiciens, ce disque est un peu mou du genou.
Ph.M.
Sscrew49
29 mars 2016 à 19 h 49 min
Interview : TLSP en mode arnaqueurs | “tous dépités par la nonchalance et le je-m’en-foutisme affichés et assumés” https://t.co/01AbnsM4wN