Roots & Roses, mieux que le muguet

Et de sept ! La septième édition du plus chouette festival du début de saison (et peut-être même après) a vécu ! C’était, comme tous les ans, ce 1er mai à Lessines. Et comme tous les ans, on « a eu bon » !

Plus vraiment besoin de détailler le concept, désormais bien rôdé. Le Roots & Roses, pour la première fois accessible gratuitement pour les habitants de la commune moyennant inscription préalable, accueille « les formes modernes de folk, rock’n’roll, blues, bluegrass et musiques roots anglo-saxonnes ». Le tout en alternance continue sur deux scènes : la Roots pour les trucs roots, et la Roses pour les trucs qui claquent un peu plus sur les tympans.

Côté traditionnel et assimilé, l’affiche renseignait cette année The Holmes, Laura Gibson, The Give ‘Em Hell Boys, Phil Cook & The Guitar Heels, The Bellrays et Southern Culture On The Skids.

FB - Bellrays

Certes, on ne peut pas dire que The Holmes soit fort roots au sens où on l’entend ici. Mélangez du Romano Nervoso avec du No One Is Innocent, et vous obtiendrez plus facilement du blues/stoner/garage que du southern néo country. Ce qui n’enlève évidemment rien à la saveur de la chose. Quant aux Bellrays, question : ils ne sont plus tellement des revenants depuis qu’ils sortent un nouvel album de covers, mais ne serait-ce pas là un signe de tournage en rond plutôt que d’un sursaut d’inspiration ? Sauf que sur scène, le mix soul/punk rock, ça le fait toujours. Et que Lisa Kekaula met du cœur (ainsi que de la voix et du coffre) à l’ouvrage. « This is a rock show, people », harangue-t-elle, inquiète qu’à 18h et des poussières, certains soient déjà un peu cuits. Moinette, Trompeuse et autre Troll ont fait leur œuvre, et certains seront passés à côté de sa version de « Whole lotta love » !

On rangera par contre parmi les plus roots de l’étape l’Américaine Laura Gibson. Auteure-compositrice tout en « thank you » timides qui promet de tenter plus tard les acrobaties, rapport au look « cirque » du chapiteau. On se rend compte au passage que les organisateurs ont soigné la sonorisation. Enfin, « au passage » : notamment à l’écoute du batteur et de son travail d’orfèvre, alliant finesse et détails.

FB - Laura Gibson

Pas de doute non plus sur les Canadiens de Give ’Em Hell Boys, qui traficotent un petit peu la country et le bluegrass comme les Pogues s’occupaient très fort de la musique celtique (boissons euphorisantes en moins). Idem pour Phil Cook & The Guitar Heels, entre gospel du Sud et folk contemporain. Même chose enfin pour Southern Culture On The Skids, les vieux de la vieille de Caroline du Nord qui balancent country, surf et compagnie avec le sourire, une invitation à l’envahissement de scène et une distribution de pilons de poulet : ces gens-là aiment aussi manger, à en croire un morceau comme « Banana pudding » (« C’est comme les spaghetti bolognaise, encore meilleur à manger le lendemain parce que ça laisse le temps de libérer les saveurs »).

Pour les roses à épines, l’électricité et pogos si affinités, on peut compter sur les Belges de Scrappy Tapes et Moaning Cities, ces derniers étant responsables cette année de l’interprétation de l’hymne du festival, écrit par Fred Lani.

Ensuite, direction Rome d’où Giuda assène la première petite claque rock’n’roll de l’après-midi. Disons que la panoplie de riffs et de refrains ne casse pas particulièrement le moule (Status Quo, AC/DC, Godfathers & co), mais ils sont balancés chez eux tendance plus glam, inspirés par les seventies, et animés sur scène par une joie de vivre et une énergie assez communicatives. C’est le 1er mai, il y a du soleil, on a envie d’aimer tout le monde et de scander avec eux !

FB - Giuda

Bob Log III, qui était vendredi aux Aralunaires, c’est une affaire immuable comme l’art du cumul chez un politicien. En plus rigolo, bien sûr. Toujours sous son casque de pilote, un cornet de téléphone à l’ancienne fixé dans la visière en guise de micro, kick drum et foot cymbal au sol, slide sur les genoux et le one man band peut faire des étincelles. Son blues/rock/punk se joue fort, évidemment, et ne fonctionne que s’il y a de la disto sur la voix. Les rythmes ? Moitié boucles électroniques moitié organiques. L’homme agrémente son set rarement carré d’un petit tour par-dessus le public, dans le canoë gonflable qui lui sert de décor scénique le reste du temps.

FB - Bob Log 2

The Love Me Nots, c’est dix ans de bouteille. Deux garçons (batterie, guitare), et deux filles (chant, basse) qui ne lésinent pas sur la touche sexy (bas résilles, talons aiguilles et jupe mini, ce genre de choses). Là aussi, l’inclination mène au rock garage, mâtiné d’une touche d’orgue Farfisa manié par Nicole Laurenne la chanteuse (juge dans un tribunal municipal dans la vraie vie et épouse du guitariste). Un orgue qui disparaît un peu dans le son balancé par les quatre de Phoenix (Arizona). Côté show par contre, rien ne manque : relisez le passage sur les tenues, et imaginez plein de poses suggestives pour aller avec.

FB - Love Me Nots 1

Exit les Shrines, le dingo King Khan débarque à Lessines en mode BBQ Show. A deux, avec son comparse Mark Sultan. Des masques de cuir et des lanières cloutées. Le King à la gratte et au chant, le Sultan à la gratte, au chant et à la batterie/tambourin. Bref, une formule minimaliste pour tremper du bon vieux rock’n’roll des familles (même les love songs comme « Alone again » sont jouées à fond de balle) dans de la sauce garage et l’emballer de vannes le temps d’une respiration. « Celle-là s’appelle « Kiss my sister’s fist », mais vous pouvez essayer l’inverse, heu… Fist my sister’s… heu, kiss ! » Ou à un type qui vient de balancer une petite bouteille d’eau en plastique sur scène : « Put your head in your ass and disappear » (ndlr : je l’aime bien, celle-là, je m’en resservirai).

FB - King Khan

Sur le coup de 23h, on s’aperçoit soudain que le thermomètre est redescendu de quelques degrés. Qu’il fait un peu cru… Normal : Heavy Trash sort tout juste de scène et, constat, n’a pas bâclé les choses. Jon Spencer et Matt Verta-Ray, de retour aux affaires sous ce nom, constituaient le top of ze bill de cette édition 2016. Le tandem, épaulé par une contrebasse et un batteur, déménage. Dans la prestation : la toujours impressionnante génuflexion élastique et soudaine, cette manière de coincer le micro de la bouche, et puis la très belle moustache façon acteur porno des seventies du second. Et dans le répertoire, où sale blues, rock garage et rockabilly se télescopent joyeusement au gré des coups de frein et d’accélérateur de la fine équipe.

FB - Heavy Trash

Finalement, Heavy Trash de cette manière-là, c’est à l’image du Roots & Roses : pas d’esbroufe. De la bonne humeur. Et là, on n’a encore rien dit de l’organisation (tout roule), ni de la bouffe qui fait tout sauf « festival ». Z’avez souvent mangé japonais entre deux concerts, vous ?

Didier Stiers

 

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