Ce jeudi, on a « verygolé » avec Caballero & JeanJass puis appris ce que signifie « faire un Moïse », avant de mettre le cap sur les grands espaces, du Sahara et des States.
A ma gauche : Caballero, grande barbe et casquette verte, né à Barcelone, installé à Bruxelles depuis son jeune âge, une grosse dizaine d’années de rap au compteur. A ma droite : JeanJass, physique longiligne, polo rayé, carolo et membre du groupe Exodarap. Le passage à la scène de Double hélice, leur album commun tout frais (il a un petit mois et fait déjà parler de lui, en bien) est une affaire qui tourne rond. Rond, pas en rond.
« Drôle », « cool », « planant » sont les termes qu’ils ont le plus souvent entendu jusqu’ici à propos de ce projet en duo. « Je pense qu’il fait sourire, les gens qui écoutent et les gens qui viennent nous voir sur scène, nous disait le second il y a quelques jours. C’est marrant de faire chanter « Merci beaucoup » à ton public ! »
On s’était dit la même chose. Et sur scène, l’humour reste toujours de mise (« Verygolo » est d’ailleurs casé en début de set), se déclinant aussi dans le jeu des deux lascars. « Motivés » par le « Pharaon blanc » ! Des lascars qui connaissent les ficelles mais n’en abusent pas. Live oblige, l’accent est aussi mis sur le son, « énergisé », et les beats que balance derrière eux DJ Eskondo font vibrer le plancher du chapiteau. Dessus : un public en moyenne plus jeune (à vue de nez) que tout ce que les Nuits ont pu rassembler jusqu’ici. Et qui ne se fait pas prier pour effectuer un Moïse. Vous voyez la Mer Rouge qui s’ouvre, et puis qui se referme ? Eh bien, c’est la même chose, mais avec des gens !
Tout ça n’empêche pas un peu de finesse pour autant : c’est notamment Vince Romeo qui l’apporte, le temps de quelques tranquilles notes de trompette. La sécu, elle, est au taquet : un petit ket à lunettes et anorak matelassé rappelle à l’ordre ceux qui ont oublié l’interdiction de taffer… La bonne nouvelle de la soirée ? On a croisé Veence Hanao venu se prendre un petit bain de jouvence (sic), et il nous a confié s’être tout doucement remis à l’écriture ! Yes ! Quant à la suite pour Caba et JeanJass ? Notamment aux Ardentes, à Dour et Esperanzah. « Oui, c’est possible ! »
A l’Orangerie, exit les platines, samples et autre mpc : avec Imarhan, il n’est plus question que de desert blues, celui que portent, telle la bonne parole, ces Touaregs aux guitares, percussions et chants hypnotiques. La langue de ces pupilles de Tinariwen (dont le bassiste a produit l’album sorti cette année chez City Slang) a beau être le tamashek, donc incompréhensible pour les Occidentaux que nous sommes, les refrains et les riffs répétés jusqu’au bord de la transe, la calebasse martelée des mains, des poings ou même des poignets se chargent de fédérer la salle. Et c’est avec « des amis de Tucson » (Xixa, passés juste avant eux) qu’ils clôturent cette enivrante célébration.
Enivrant n’est peut-être pas le qualificatif qui convient le plus parfaitement à Steve Gunn, cet ex-Violators (les musicos de Kurt Vile) n’ayant pas une voix extrêmement particulière. Mais cet artiste inspiré et prolifique a une manière de la poser, de raconter ses histoires philosophico-naturalistes (de l’« existential road music », nous rappelle un collègue chroniqueur) et de jouer de ses guitares (acoustique sur le touchant « Wildwood ») avec une telle délicatesse… On se laisse donc plus d’une fois porter par cette americana aux teintes bluesy, qui s’éloigne toujours très vite de ses racines classiques pour zyeuter vers le ciel. Qui renvoie en tout cas plus souvent aux grands espaces des States qu’aux rues de Brooklyn où Gunn est basé. Seul ou en groupe (basse, batterie et pedal steel ce soir) : voyage inspiré !
Didier Stiers
Imarhanband
21 mai 2016 à 11 h 37 min
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