A Werchter, elle nous avait ravis, Polly Jean Harvey. Mercredi à Forest National, toujours aussi impériale, elle a remis ça.
Polly Jean à Forest, quelle drôle d’idée ? Ou pas. Après tout, l’arène bruxelloise en configuration club accueille quand même 5.500 personnes, ce mercredi soir. Aux dires de l’organisateur. On n’attendra pas les chiffres de la police pour rappeler que l’Anglaise est passée cet été par Werchter et que sa prestation, là aussi essentiellement alimentée par son dernier album en date, The hope six demolition project, donna lieu à un des tout bons concerts de cette édition. Voire, sans l’once d’un fifrelin de parti-pris (jamais !), le meilleur.
Sa tournée s’intitule comme le disque en question et, tout pareil qu’à Werchter, c’est en cortège derrière la caisse claire – sur « Chain of keys » -, que la troupe rejoint la scène. PJ, plumes dans les cheveux et gambettes à l’air dans sa tenue signée Ann Demeulemeester, est au saxo… A Werchter, la qualité de la sonorisation avait ravi nos petites oreilles : ici, malgré quelques aigus un peu crispants, la voix comme les instruments passent à merveille.
Et l’on se retrouve très vite baignant dans cet univers unique, où surgissent poésie, opéra et réminiscences de vieille folk. Aaah, le lyrisme irrésistible des refrains de « Ministry of defence » et de « Community of hope »… « The orange monkey » a ce soir un petit quelque chose de comédie musicale. Et dans les attitudes, qu’il s’agisse des gestes amples du bras pour PJ Harvey ou de l’immobilité de ses musiciens sur la fin de nombre de titres, on décèle aussi un peu de théâtre.
En 2016, elle a abandonné la jumpsuit rose mais n’en impressionne pas moins les rétines pour autant. Un sentiment renforcé par le décor : un écran sur lequel figure une sorte de façade néo-classique dont les fenêtres changent de dimensions au gré des projections. La chanteuse, elle, ne s’adressera que deux fois au public : pour un vibrant « thank you very much » en fin de concert, et auparavant, pour présenter ses musiciens. Entre autres : Terry Edwards au saxo (blanc et diabolique, le saxo, pour « Ministry of social affairs »), Mick « The Bad Seeds » Harvey, l’immense John Parish, Jean-Marc Butty aux percussions, Alain Johannes, croisé avec Them Crooked Vultures et QOTSA…
The Hope Six Demolition Project compte onze titres : neuf sont chantés ce mercredi. Rappelons-le aussi : l’album est inspiré par ses séjours au Kosovo, en Afghanistan et à Washington DC où furent détruits puis reconstruits des logements dans le cadre d’un programme taxé par certains de « nettoyage social ». Polly revisite également White chalk (2007), avec « The devil », enchaîne quatre extraits de Let England shake (autre album « engagé » puisqu’il évoque quelques conflits auxquels se mêla le Royaume-Uni). Et puis, comme à Werchter toujours, surviennent ces trois classiques (qui consolent au passage les nostalgiques) : « Down by the water », « To bring you my love » et un « 50ft Queenie » envoyé comme une claque sur les oreilles. Eh oui, la petite flamme du rock brûle encore !
L’écran et sa façade descendent, comme engloutis par la « River Anacostia »… Le groupe s’aligne pour saluer… Mais Forest réclame un petit supplément, sur cette setlist qui ne varie quasi pas au fil de cette tournée. Il y aura donc deux rappels, comme chaque soir. Ici, ce sera « Highway 61 (Revisited) » de Dylan mais qu’elle chantait déjà avant le Nobel (sur le Rid of me produit par Albini en 93), puis « Guilty », un inédit tiré des sessions d’enregistrement du dernier album.
Et sinon… C’était mieux ou moins bien qu’à Werchter ? Disons : plus long de trois morceaux, aussi intransigeant quant au répertoire et pareillement maîtrisé. On sait Polly un peu espiègle : c’est peut-être ce petit trait de caractère qu’on aura moins décelé ce mercredi. Ce qui n’enlève quasi rien au plaisir éprouvé en sa compagnie…
Didier Stiers
(Photos : Mathieu Golinvaux)
Setlist : Chain of keys – The ministry of defence – The community of hope – The orange monkey – Let England shake – The words that maketh murder – The glorious land – Written on the forehead – A line in the sand – To talk to you – The devil – Dollar, dollar – The wheel – The ministry of social affairs – 50ft queenie – Down by the water – To bring you my love – River Anacostia Rappels : Highway 61 revisited – Guilty.
acidbatgirl
20 octobre 2016 à 15 h 15 min
PJ, tu nous manques déjà | frontstage/ https://t.co/JLbMhpuLM1
chaacattac
22 octobre 2016 à 0 h 23 min
je confirme https://t.co/fhTnLvB0IQ