La première de Lady Sir à Bourges

BOURGES
DE NOTRE ENVOYE SPECIAL

Les affiches électorales déchirées étaient là pour nous le rappeler dans les artères d’une manifestation à forte majorité mélenchonienne à en croire les sondages improvisés. La presse locale n’a pas manqué non plus de nous rappeler que le policier Xavier Jugelé, assassiné Champs-Elysées par Karim Cheurfi, était né à Bourges. Et ce sont plus de 500 policiers – un record de mémoire de festival – qui ont assuré la sécurité des milliers de personnes venues pour s’amuser et se détendre.

Malgré tout ça, le public a répondu présent en masse et tout s’est bien déroulé cette semaine en Berry, dans une ambiance bon enfant.
Samedi, le théâtre Jacques-Cœur était complet pour la double affiche Albin De La Simone et Lady Sir. Albin présentait son nouvel album entouré de ses habituelles demoiselles (violoncelliste et violoniste) et de son guitariste-percussionniste. Tout cela sans sonorisation – sinon vocale – pour préserver l’intimité et l’authenticité de son propos : les relations au sein du couple, la difficulté d’aimer et de faire durer l’amour. Cette proximité acoustique, c’est justement ce que recherche en ce moment un public en quête de vérité et d’originalité. Albin, avec douceur, humour et finesse a superbement rempli sa mission.
Le suivaient sur la même scène Rachida Brakni et Gaëtan Roussel qui ont choisi le Printemps pour la première sortie publique – comme le dit Gaëtan – du projet Lady Sir.
Entourés d’un véritable groupe rock très électrique, les deux chanteurs n’ont pas cherché à masquer leur concentration et la tension propre à toute première. Les chansons neuves sont très bien déclinées mais cela manque encore un peu de chaleur. Gaëtan s’en est sans doute rendu compte au moment de reconnaître qu’ils étaient très impressionnés car d’habitude plus bavards. « On a plein d’histoires à raconter mais ce sera pour la prochaine fois. »
Le voyage valait malgré tout le déplacement car la classe et le plaisir étaient bien au rendez-vous.

Quand les livres chantent

On retiendra de cette quarante-et-unième édition berrichonne le succès des rencontres intimes entre musique et littérature. Quatre écrivains figuraient au programme du Printemps 2017. Delphine de Vigan, romancière et réalisatrice, a rendu un hommage à Bob Dylan en compagnie de la Grande Sophie alors que Virginie Despentes, en compagnie du groupe rock Zëro, a lu le Requiem des innocents de Louis Calaferte. Mais c’est encore mieux quand les auteurs défendent eux-mêmes leurs textes en musique. Ainsi Magyd Cherfi, le chanteur toulousain de Zebda, a-t-il, au Palais Jacques Cœur, lu des extraits de ses trois livres (La trempe, Livret de famille et Ma part de Gaulois) accompagné, pour trois chansons, du pianiste Samir Laroche. Magyd fait plus que lire, il interprète, éructe, vit complètement ses souvenirs d’enfance et de famille. Son rapport aux mots comme aux gens fait étroitement partie de son identité multiple. Identité aussi avec Gaël Faye, prix Goncourt des lycéens pour son Petit pays (le Burundi) qui lit et slamme, flanqué du guitariste et chanteur Samuel Kamanzi. Sa famille aussi est au centre de son récit qui, à Bourges, s’est terminé par le génocide rwandais de 1994, créant une tension et une émotion vraie qui a véritablement ému un public sous le charme d’un auteur, d’un artiste, d’un récit. Les histoires authentiques ne sont-elles pas les plus belles ?
THIERRY COLJON

Albin de la Simone sera aux Nuits Botanique le 11 mai et à Tournai du 12 au 14 mai.


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