Pour une dernière soirée, c’était une belle dernière soirée ! Chaude, électrique, festive, arrosée. Rock, quoi ! Notez, rien qu’en découvrant l’affiche il y a quelques mois, soit The Glücks, La Jungle et Thee Oh Sees, ça sentait déjà plus la transpiration que le N°5…
Mais comment font-ils, les mecs de La Jungle, pour rendre leur mix de transe, de kraut, de (math) rock et de noise aussi dévastateur à chaque fois qu’ils montent sur scène ? Franchement, c’est quoi ce truc qu’il y a entre Rémy (batterie) et Mathieu (guitare, loops, cris occasionnels), ce truc qui leur permet de se trouver et se répondre en une fraction de seconde, même quand ils laissent de la place à l’impro ? Qui fait qu’ils dégagent cette énergie contagieuse dès les premières secondes ?
Ce dimanche sous le chapiteau, elle pourrait quelque peu se diluer vu la surface des lieux. Mais La Jungle reste terrible, c’est sauvage comme l’animal et direct comme le coup de poing. Ça déboîte les genoux sur ce rock technoïde d’« Ape in a python » et « Cold », ça redistribue les neurones sur des compos plus éclatées comme « Technically you are dead » et « Hahehiho ». Ceux qui en redemandent se pressent dans les premiers rangs, et ils sont en nombre !
Il y a quelques jours, La Jungle est allée mettre le souk en Angleterre. A Londres et à Brighton. « C’était notre plus gros challenge cette année, raconte Rémy, croisé après le concert sur les marches du Bota. Là on est soulagés, ça a bien marché. » L’été du groupe sera on ne peut plus chargé. Ensuite, il s’agira de lever un peu le pied côté scène. Tout d’abord parce que son comparse aura de nouvelles obligations familiales. « Et puis, l’idée est de ne pas épuiser les gens. On voudrait aussi travailler sur un album, et qu’il puisse sortir en 2018 ou 2019. »
Alors Thee Oh Sees… Dans ce contexte… C’est juste parfait, figurez-vous ! Full frontal, les Californiens : à quatre en ligne face au public, bassiste à droite, John Dwyer à gauche et les deux batteurs au milieu. Eux non plus ne sont pas là juste pour faire le spectacle, même si leur frappe synchro en met plein les yeux. La puissance dégagée du coup par certains titres est juste dingue et renforce encore le contraste avec la voix allumée, parfois presque haut perchée du même Dwyer, toujours en bermuda, toujours avec sa guitare translucide accrochée sur la poitrine. Son groupe et lui sont en fin de tournée, mais il fait bien de le préciser parce qu’après « The plant » en ouverture, « The dream », « I come from the mountain » et autre « Toe cutter/Thumb buster », pas de baisse de régime à signaler. Les vingt dernières minutes sont carrément ahurissantes : un seul morceau, concentré de rock garage noisy psyché…
Pour une dernière soirée, entamée ne l’oublions pas au son ravageur des réminiscences crampsiennes du duo ostendais The Glücks, quelle belle dernière soirée !
Didier Stiers