Le chanteur nantais s’est rappelé à notre bon souvenir avec un concert généreux, vendredi à l’Ancienne Belgique.
Vingt-cinq ans qu’il traîne sa carcasse dans le game de la chanson en français. Dominique A est toujours là, tenant la barre de son voilier, voguant à fière allure, fringuant même. 2018? Toute latitude, douzième album studio aux saveurs electro-pop, comme un retour à ses débuts bricolo de La Fossette. Et on repart pour une tournée, avec les mêmes ou presque – dont Sacha Toorop à la batterie. Question: Dominique A a-t-il tout dit ?
C’est un peu le sentiment qu’on a en début de concert. Monsieur A enchaîne les titres du dernier album, mais c’est comme si on connaissait déjà la chanson. Une chanson qui ramène aux lointaines années 90. D’ailleurs, on est entre gens de connaissance. L’AB n’est pas remplie, mais le public est celui, fidèle, qui suit le bonhomme depuis des années. Connexions liégeoise et bruxelloise, tout le monde dans la salle connaît son A.
Mais voilà, il est parfois difficile d’entrer dans le monde de Dominique A tant l’écart est (parfois) grand entre la voix (très chanson française) et la musique (pop-rock ou franchement electro). Le Nantais a toujours eu le cul entre deux chaises et il s’en est souvent délecté, créant au passage son propre style, sa singularité. Mais l’écart ne s’est-il pas creusé avec les années au point de devenir gouffre et de le retrouver le cul par terre ?
En fait, non. Alors que le concert avance, on se laisse happer et on retrouve ses repères. Si la setlist n’est pas des plus évidentes, le concert est généreux (plus de deux heures) et le chanteur est en forme, discute et déconne, sans forcer. A partir du duo « Rendez-nous la lumière »/« Le commerce de l’eau », la machine tourne à plein régime et certaines chansons du nouvel album, au parti pris electro décomplexé, étonnent pour le meilleur (« Se décentrer » ou l’incroyable « Corps de ferme à l’abandon », récit anxiogène façon Petit Paysan sur electronica radicale).
Après quoi, Monsieur A se et nous fait plaisir : « Eléor », un « Cap Farvel » retravaillé et « Au revoir mon amour » qui est devenue sa chanson la plus connue, en début de rappel. Et puis, replongeant plus loin dans le passé, il ressort quelques perles quasiment oubliées de son vaste catalogue tels « Le métier de faussaire » et même le « tube » non assumé des débuts « Le Twenty-Two Bar ». Et de terminer, avant un ultime rappel, avec « Le courage des oiseaux ». On comprend alors tout le génie de Dominique A, seul chanteur à même de marier Kraftwerk et Boris Vian avec tant d’aisance. De quoi chanter joyeusement dans le vent glacé.
DIDIER ZACHARIE
Photos MATHIEU GOLINVAUX
SETLIST Cycle/ La mort d’un oiseau/ Les deux côtés d’une ombre/ Vers le bleu/ Va-t’en/ Le sens/ Aujourd’hui n’existe plus/ Le reflet/ Se décentrer/ L’océan/ Toute latitude/ Rendez-nous la lumière/ Le commerce de l’eau/ Lorsque nous vivions ensemble/ Exit/ Cap Farvel/ Corps de ferme à l’abandon/ Le métier de faussaire/ Eléor RAPPEL 1 Au revoir mon amour/ Immortels/ Le Twenty-Two Bar/ Le courage des oiseaux RAPPEL 2 Le convoi