Tant que le Feu! brûle

Au cinquième jour des Nuits Botanique, c’est un petit triomphe qu’a obtenu Feu! Chatterton sous le chapiteau.

Le poète remercie avec une certaine prestance, le sourire toujours prêt à arrondir les angles. Prêt à faire fondre, aussi… C’est que l’audience est à ses pieds, qui hurle, frappe dans les mains, donne de la voix. Lui s’en réjouit de tout ce tintamarre, de ce qu’il faut bien appeler un petit triomphe. Sept ans depuis le premier phrasé musical dans l’est parisien, le poète peut se délecter, il en est là.

Feu! Chatterton ne cesse de grimper les échelons. On les a connus à la Rotonde à l’heure du premier EP (qui s’échange aujourd’hui aux alentours de 70 euros sur Discogs), on les a suivis à l’Orangerie alors que le premier album voyait le jour. Et puis, le Cirque Royal pour terminer la tournée, au printemps 2016, déjà lors des Nuits Botanique. Les voilà aujourd’hui dans le chapiteau de ces mêmes Nuits, alors que dehors, la pluie s’acharne. « Nous sommes à l’abri, jardin des Nuits ». Certes oui, bien au chaud, même, tant ce chapiteau paraît étroit pour le Feu ! qui brûle.

« Quel est ce parfum que le vent dépêche ?/ On dirait que la chair brûle/ Viens, suis-moi, je connais l’endroit/ Où l’herbe est encore fraîche »

BRUXELLES, concert nuits du botanique bota   Feu! Chatterton.GOLINVAUX MATHIEU./LESOIR

Sorti en mars dernier, L’Oiseleur, deuxième album du combo parisien appuie un peu plus encore sur le côté rock lettré. Et ma foi, à bon escient ! Arthur Teboul a beau en faire des tonnes sur scène, il reste pourtant mesuré, se contentant d’emmener ses auditeurs – ses disciples – dans ses histoires de temps qui passe, d’amour lasse et d’été qui s’achève. Derrière lui, le groupe est une machine à tubes, fine et ciselée, qui déroule sans mot dire entre arpèges de guitares, envolées fiévreuses et nappes de synthés. Il y a du Noir Désir dans ces chansons poétiques, du Bashung et du Gainsbourg aussi. Il y a du LCD Soundsystem et du Raptures aussi. Entre chanson, rock et disco-punk, Feu ! s’avance et commande.

Chaque titre, qu’il soit du premier ou du deuxième album est un tube, acclamé comme tel, reconnu entre tous, déjà intemporel. « Ginger » dès l’entame du set, « Côte Concorde » et « A l’aube », rescapés de ce fameux EP précité, « La mort dans la pinède » et mieux encore « L’ivresse », leur version à eux du hip-hop encore plus réussie en live que sur disque, et la ballade cramée « Souvenir » en premier rappel, diamant brut et précieux qui a la forme d’un vieux bijou esquinté.

« Quel est cet endroit où dans l’ombre confuse/ Les démons et les anges se mélangent ?/ Ah, je te rejoins dans cette brume épaisse/ Que le tabac, le benjoin, obscurcissent »

BRUXELLES, concert nuits du botanique bota   Feu! Chatterton.GOLINVAUX MATHIEU./LESOIR

Et puis, juste au moment où on se dit que tout cela est un peu trop facile, que cela manque de déviance, de défi, Feu ! sort des sentiers battus et s’éloigne par « La Fenêtre » sur une autoroute krautrock bruitiste pour mieux décoller façon « Boeing » avec « La Malinche », l’irrésistible, qui se déploie dans une version disco-punk furieuse qui libère le beat et les basses. Bienvenue au club. « Ah, jardin des Nuits, quel plaisir ! », s’amuse le chanteur. Un triomphe, c’est ainsi. Qui donne au groupe l’occasion de s’offrir un deuxième rappel pour mieux conclure, pour mieux sortir du rêve, du monde des Idées, des fantasmes.

« Alors, le matin s’est levé sur nos corps nus/ Il faisait un petit peu froid/ Adieu, adieu verger/ Adieu, adieu verger… »

Jusqu’à quelle hauteur brûlera le Feu !? Il est encore trop tôt pour le dire, tant il ne cesse de grandir.

DIDIER ZACHARIE
Photos MATHIEU GOLINVAUX

BRUXELLES, concert nuits du botanique bota   Feu! Chatterton.GOLINVAUX MATHIEU./LESOIR

BRUXELLES, concert nuits du botanique bota   Feu! Chatterton.GOLINVAUX MATHIEU./LESOIR

BRUXELLES, concert nuits du botanique bota   Feu! Chatterton.GOLINVAUX MATHIEU./LESOIR

Journaliste lesoir.be

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