Lundi fut une très belge Nuit au Botanique, avec Angèle, Atome, Baloji, Ebbène et Chance…
On a coutume de dire, du moins en Belgique francophone, qu’un artiste chantant dans sa langue maternelle fait preuve de maturité. Fini les reprises adolescentes du répertoire rock anglo-saxon, fini les balbutiements grammaticaux approximatifs et l’accent souvent moqué dans le nord du pays. Avec l’âge arrive le temps de la prise de conscience, du sens du risque, et la fin de l’insouciance.
Ainsi Ben Baillieux-Beynon des Tellers. Ainsi Remy Lebbos des Vismets. L’un et l’autre, avec leur nouveau projet Ebbène et Atome, précédaient, lundi soir, Chance et Angèle. Ben, pour sa part, au Salon, a succédé au groupe Le Manou de la Flamande Manou Maerten révélée il y a quelques années par « The Voice Belgique ». Celle-ci a choisi de chanter en français (comme de nombreux artistes flamands) et en anglais mais une pop aux accents soul qui ne nous a pas vraiment convaincu. Comme du sous-Typh Barrow qui doit encore grandir. Ben, en tout cas, a bien grandi. L’aventure Tellers (2005-2010) une fois terminée, il s’est lancé dans ce projet Ebbène basé sur des chansons folk aux textes français forts et intimistes. Sa voix particulière va à merveille à ces histoires du quotidien qui touchent au dépouillement et à la gravité. A suivre donc…
Atome et Angèle
On n’a pas le temps de rester à la Rotonde complète pour Sonnfjord. Impossible de tout voir. A l’Orangerie, on retrouve, après le set du DJ anderlechtois Baptiste Bosmans (et ses « spacey tropical beats » repérés par Red Bull Elektropedia), Remy Lebbos qui fait provisoirement une infidélité aux Vismets pour passer au chant en français en compagnie de David Picard, du groupe belgo-français Applause disparu en 2015 après huit ans de bons et loyaux services. En formant le groupe Atome, l’idée est de se lancer dans un rock toujours aussi psychédélique et planant, la tête dans les étoiles, telle une « Voie lactée » aux accents très colorés.
Arrive ensuite la très attendue Angèle que nous dispute déjà, avec une fièvre inhabituelle, toute la presse française. Il aura suffi de deux chansons (« La loi de Murphy » et « Je veux tes yeux ») pour créer le buzz, la jeune Bruxelloise imposant un style original et un joli minois en plus d’un solide pédigrée. La fille de Marka et de Laurence Bibot, régulièrement invitée sur scène par son frère Roméo Elvis, lui rend la pareille pour un touchant duo alors que sa reprise (de longue date) du « Bruxelles » de Dick Annegarn est tout aussi convaincant que ses autres chansons personnelles qu’on retrouvera dans son premier album à paraître à l’automne. Angèle a une réelle présence scénique et son charme naturel fait le reste. Oui, Angèle a du talent et n’est pas l’invention de médias en surchauffe.
Baloji et Chance
Baloji, cela fait des années qu’il est le patron et qu’il livre des prestations extatiques cinq étoiles. On le suit depuis toujours et il ne nous a jamais déçu. Ce fut une fois de plus le cas, lundi au Chapiteau tanguant, avec son Orchestre de la Katuba. Son cocktail francophone de rap, de rumba, de chanson et d’afro-beat est original et efficace. Il n’est que bonheur et énergie et c’est tout simplement parfait !
On termine par Chance qui a perdu son prénom Antoine en cours de route (parti sous les auspices d’Universal-France qui n’a pas tenu ses promesses) pour se retrouver aujourd’hui dans le bercail de PIAS. Le fils Geluck, entouré de sa famille dans la salle, a présenté son nouveau groupe et ses nouvelles chansons qui sont la suite logique de son univers tendre et poétique. Il va dorénavant à l’essentiel, libre de toute contrainte, restant lui-même, doux et perfectionniste. Encore un album très attendu !
Bref, la planète chanson de Belgique ne s’est jamais si bien portée comme on en a eu la brillante démonstration par ce lundi pluvieux !
THIERRY COLJON
PHOTOS MATHIEU GOLINVAUX.