Le 9e Roots & Roses, c’est fait ! Mardi, on s’est encore une fois bien amusés, dans la ville de René Magritte, entre ces deux chapiteaux où les concerts se sont enchaînés sans temps morts.
Les amoureux des formes modernes de folk, rock’n’roll, blues, bluegrass, garage et autres auront donc toujours été à la fête… Météo plus que clémente, jus de houblon divers et variés, programme musical copieux (14 groupes et artistes pour cette édition), deux scènes (facile, la Roots pour les trucs roots, et la Roses pour les trucs qui claquent un peu plus sur les tympans) : à l’approche dans grands raouts de l’été, la simplicité a souvent quelque chose d’attrayant !
Difficile de faire plus simple que Tony Joe White. Assis en front de scène, chapeau et lunettes noires, guitare, harmonica et voix profonde comme un bayou de Louisiane. Derrière lui, son batteur… Sauf que ça cause beaucoup sous le chapiteau et on se dit qu’il ne peut pas ne pas l’entendre. Dur métier, même quand on compte à son actif un « Polk salad Annie » repris en son temps par le King himself, ce « Steamy window » filé à Tina Turner, voire même « The guitar don’t lie » emprunté à Joe Dassin et que ce dernier corrigera un jour en version cuivrée ! Bref, dommage pour la balade dans le classique. Ou le traditionnel, comme vous voulez…
Un qui n’aura pas laissé le temps aux papoteurs de s’exprimer, par contre, c’est l’inoxydable Arno. L’Ostendais livre un set tendu (oui, je sais, pardon…), respirant à peine pour rappeler l’admiration que suscite chez lui Mireille Mathieu (et sa coupe de cheveux). Son répertoire de vannes reste pareillement intact au fil de ses anniversaires (69 ans ce mois-ci), mais sans elles, il ne serait plus le même, non ? Alors, Arno en version Tjens Matic, c’est un mix des classiques de TC Matic et de Tjens Couter, le groupe qu’il formait au début des années 70 avec Paul Couter. « Dance with me », « Que pasa », « Ha ha », etc, et pas d’impasse sur « Oh la la la » ni « Putain putain ». Prochain passage en festival de notre bluesfunkrockeur national : le 30 juin au Verdur Rock (gratuit).
Les Darts non plus ne font rien pour faciliter la conversation au pied de la scène. Le quatuor emmené par Nicole Laurenne – et à qui revenait cette année le soin d’interpréter l’hymne du festival – est du genre joyeusement teigneux et bordélique. Garage et punk, quoi, y compris dans la chanson d’amour « interdite aux moins de 14 ans ». Les photographes sont à la fête : les Darts assurent le show, entre la guitariste qui prend des poses, et Nicole elle-même – en shorty – qui se couche sur son orgue Farfisa ou appelle une gamine pour venir en jouer. La chanteuse et sa bassiste deviennent des habituées des lieux, qu’elles avaient déjà eu l’occasion de fréquenter en 2016 avec The Love Me Nots.
C’est vrai qu’il y a aussi du spectacle, au Roots & Roses. Du catch à l’extérieur, de l’escalade de contrebasse et de l’expo de tatouages dedans. Ça, c’était avec Dead Bronco. De l’impro au saxo chez Cocaïne Piss (chargé de réveiller tout le monde à 11h du matin, ils sont fous, ces organisateurs). Une banane rockab’ toujours impeccable sur la tête de Patrick Ouchène qui officie avec Crystal & Runnin’Wild… King Khan et ses Shrines restent farces : son guitariste s’en va jouer porté par le public, et puis le chef d’orchestre s’improvise Monsieur Loyal pour ses copains des Black Lips avant de les accompagner à la fin de leur set sur « Bow down and die ».
Les Black Lips justement à Lessines ? La très bonne idée de cette édition du festival ! Peut-être ont-ils été un jour plus sauvages, mais clôturer (ou presque) ce 1er mai par une grosse fiesta pareille, ça laisse des bons souvenirs. « Family tree » passe comme un hymne et « O Katrina ! » met le souk dans les premiers rangs, un souk comme on n’a pas dû en voir souvent dans l’histoire du Roots & Roses. Et ceux qui ne pogotent pas braillent « O Katrina ! » à s’en faire péter les cordes vocales, d’ailleurs. Meilleur morceau de la journée, n’en déplaise aux Blasters, dernier groupe du jour. En 2019, le 1er mai tombe un mercredi. Notez déjà !
Didier Stiers